Puniques et Numides – Les Phéniciens en Afrique du Nord – Partie 3
Première partie : Les Phéniciens et la Méditerranée orientale (disponible ici)
Deuxième partie : Les Puniques et la Méditerranée occidentale (disponible ici)
Troisième partie : L’Afrique des Numides.
Nous avons décidé de publier cette étude à travers trois articles, en voici la partie 3
Troisième partie : L’Afrique des Numides.
Nous voici donc arrivés au terme d’une pérégrination historique qui nous a conduits à une analyse du peuple autochtone d’alors, les Numides et non les Libyens, ainsi désignés par les Grecs. Il s’agit d’une même culture, celle des berbères, que le terme Amazigh [ⴰⵎⴰⵣⵉⵖ], tend aujourd’hui à remplacer, car linguistiquement plus correct. Non pas que le terme de ”berbère” ait une quelconque connotation péjorative (ce serait plutôt le mot ”barbare” qui le serait, en relation aux invasions marquant la chute de l’Empire romain). Les Romains avaient repris le terme grec [βάρϐαρος, barbaros], que les Égyptiens utilisaient aussi pour désigner tout étranger à leur propre culture. Socio-linguistiquement parlant, la plupart des pays asiatiques utilisent un terme identique pour désigner plutôt les Occidentaux : Gweilo [鬼佬] pour les Chinois, Masaleh pour les Malaisiens, Bule pour les Indonésiens, et Farang [ฝรั่ง] en Thaïlande et au Laos.
La première considération sur les Phéniciens a permis d’apprécier à quel point ils ont contribué à la diffusion du savoir en Méditerranée, parallèlement aux Grecs. En fondant la colonie carthaginoise, leur côtoiement avec la culture numide locale a progressivement altéré les racines originelles en une culture désormais appelée punique. Or, cette lente mutation s’est étendue à d’autres aires du voisinage. La Tripolitaine, Utique, ou le site de Kerkouane, au cap Bon, précédemment évoqués, n’en sont que trois illustrations. On pourrait citer les fouilles de Pupput (Hammamet) ou bien d’Hadrumète (Sousse) qui, fondée au IXe siècle av. J.-C. serait même antérieure à Carthage. Constantine, l’ancienne Cirta romaine, qui doit son nom à l’empereur Constantin Ier, était auparavant une ville numide. La toponymie du lieu n’est pas totalement établie : elle pourrait soit émaner du Tamazight, soit d’une racine sémitique phénicienne QRT, celle du mot Qirta ou Kart, signifiant une « ville ». Toutefois, dans un article de l’Encyclopédie berbère, S. Bertrandy[1] écrit : « Il est douteux que le nom de Cirta soit un mot d’origine phénicienne signifiant « ville ». Sur les monnaies de Cirta, à légendes néo-puniques et datées de la fin du IIe siècle avant notre ère, on lit, en effet, KRTN (Kirthan) avec un kaph. Or le terme phénicien QRT (Qart) débute par un qoph (Mazard, Corpus, n° 523-529). Il faut donc plutôt attribuer à ce nom une origine libyque ».
Ce même article évoque les liens des Numides et des Puniques au sujet du sanctuaire d’El Hofra : « Durant la période d’indépendance de la monarchie numide, Cirta a abrité un sanctuaire très important consacré au culte de Ba‘al Hammon et de sa parèdre Tanit ». La mention du site carthaginois est significative. S. Bertrandy ajoute : « Avec ce sanctuaire, Cirta doit être considérée comme le second foyer religieux punique de l’Afrique du Nord après Carthage, et après la chute de cette dernière, comme un conservatoire des rites culturels et de l’iconographie puniques dans ce que fut l’ancienne zone d’influence punique en Méditerranée occidentale ».
Quoi qu’il en soit, les mentions de ces différents lieux définissent le périmètre numide si étroitement lié à Carthage (Qart-Hadash). Le sociologue Jean Servier[2] remarque que : « au Ve siècle, à l’époque de saint Augustin, le punique était encore parlé aux environs de Constantine, du moins dans la région d’Hippone (Bône-Annaba) et de Thagaste (Souk-Ahras), mais c’était un parler dont se servaient les paysans et que les savants dédaignaient ».
Pour pouvoir mieux comprendre cette influence, il faut donc tenter de cerner un peu plus la culture numide existante. Car s’il est clair que les échanges se sont produits dans le sens phénico-punique, il est tout aussi intéressant de savoir ce qu’ils ont été dans le sens, numido-punique que l’on appelle plus largement libyco-punique.
8.Qui sont les Numides ?
L’encyclopédie Universalis[3] décrit les Numides de la manière suivante : « Le cœur du pays numide était l’actuel Constantinois, les hautes plaines qui s’étendent entre l’Aurès au sud, le Hodna et la Petite Kabylie au nord. Cependant, on considérait comme numides les tribus berbères de l’actuelle Tunisie. Les Numides peuplaient donc la partie orientale du Maghreb et se distinguaient des Maures de la partie occidentale, des Gétules des confins sahariens. Tous n’ignoraient pas l’agriculture, mais, pour l’essentiel, jusqu’au IIIe siècle avant notre ère, ils vivaient en nomades pasteurs : les Grecs les nommaient [ὅι Νομ́αδες], « ceux qui font paître », et c’est l’origine du nom des Numides.»
9.Les difficultés existantes.
La totalité des écrits mentionnant les relations existantes a malheureusement disparu lorsque les Romains ont brulé Carthage dans une volonté de n’en laisser aucune trace.
Les sources qu’il en reste sont éparses. Elles sont fondées sur des épitaphes découvertes sur des sites archéologiques. Ou bien elles sont l’œuvre d’historiens romains, émanant d’un peuple ennemi de Carthage, et donc sujet à caution. Les sources grecques sont plus fiables, ainsi que celles de l’historien Ibn Khaldoun[4]. Par voie de conséquence, elles sont donc postérieures.
Les mythes sont restés, comme il se doit, car la fonction première du mythe et des symboles est d’être diffusée d’abord oralement, de manière intemporelle. On a pu ainsi constater comment le mythe pouvait avoir une assise historique permettant à la science d’établir des données concrètes au fil des ans, des découvertes et des avancées technologiques.
C’est donc grâce aussi à ce corpus établi que l’on peut connaître un peu mieux les Puniques d’une part, les Numides de l’autre. En revenant donc sur un certain nombre d’épisodes ou de lieux déjà mentionnés, on peut élaborer une sorte de portrait-robot du peuple numide. Par ailleurs, on constate que les historiens ont davantage préféré se pencher sur les grandes civilisations méditerranéennes, égyptienne, grecques ou romaine. La religion islamique conquérante a adopté une position similaire en mettant en avant les racines proche-orientales plutôt que les racines locales. Il y a donc longtemps eu un oubli délibéré de la culture libyque antique.
10.Les apports numides.
Il convient avant tout d’essayer de comprendre quel était l’état d’esprit des peuples de la haute Antiquité. C’est une époque charnière de voyages, de découvertes, d’échanges non seulement commerciaux, mais aussi culturels. Il est également utile de souligner – dans cette période du monde contemporain – que ni la notion politique d’État, ni la religion, ou tout autre sentiment de supériorité raciale n’avaient cours. L’intention n’est pas de décrire un monde qui aurait l’apparence d’être idéal. Les guerres, les conquêtes, les tractations les plus diverses existaient. Malgré tout, on assiste à cette époque-là, à une grande bienveillance entre les diverses cultures et le bénéfice qu’une telle contribution pouvait apporter. Dans un ouvrage consacré aux symboles égyptiens, Christiane Desroches Noblecourt[5] écrit : « la civilisation pharaonique ne connaissait pas le racisme – une notion qui n’existe pas dans l’Antiquité ». Le mythe grec de Cadmos, frère d’Europe, attribue à cet Asiatique la fondation de Thèbes et même la transmission de l’alphabet phénicien permettant aux Grecs d’élaborer le leur. L’étude consacrée à l’influence libyque auprès des Grecs[6], a démontré les emprunts mythologiques hellènes au contact des peuples nord-africains.
Des fusions similaires se sont également produites avec les Carthaginois comme nous allons l’expliquer.
La présence des Puniques aura une influence capitale. Car les Numides seront à la fois les spectateurs de l’histoire carthaginoise, et des acteurs participant à l’émergence progressive d’une civilisation punique distincte en terre africaine.
10.1.Le tribut lié à la fondation de Qart-Hadash (la Ville nouvelle). La fondation de Carthage s’effectue par l’entremise d’un pacte qui a nourri le mythe, mais aussi par un traité fixant les modalités d’un paiement annuel échelonné dans le temps. Il ne s’agit nullement d’une conquête militaire. Jean Servier[7] précise que : « Carthage, depuis sa fondation, payait – on ne sait pas à qui – un tribut annuel pour le loyer du sol qu’elle occupait ». Or ce tribut a bel et bien été acquitté jusqu’à son terme. En citant Carthage, Gabriel Camps[8] ajoute : « En fait, une redevance fut payée régulièrement pour le loyer du sol couvert par la légendaire peau de bœuf (explication fantaisiste du nom de Byrsa) ». L’historienne M.G. Amadasi Guzzo[9] ajoute même que cette échéance aurait eu lieu au Ve siècle av. J.-C. « Le premier véritable développement urbain de Carthage a dû avoir lieu à partir du Ve siècle, lorsque, d’après les sources, Carthage se serait affranchie du tribut payé aux Libyens à partir de sa fondation et lorsque, peut-être, après les défaites en Sicile, elle se concentra dans la constitution d’un « empire » en Afrique ».
L’acquittement des droits au sol dans la durée a manifestement été une source de revenus pour les Numides, en même temps que cela attestait d’un souci de reconnaissance vis-à-vis du peuple autochtone.
10.2.La figure historique de Hiarbas. Le personnage cité dans le mythe de fondation est historiquement connu, ce que confirme le texte de G. Gamps dans l’Encyclopédie berbère[10] : « Hiarbas est dit “roi des Maxitani” (qu’il faut lire Muxitani). J. Desanges a montré qu’il s’agissait d’un peuple ou d’une tribu historiques ».
10.3.Les Maxitani : une déformation linguistique. Le peuple numide de cette région de l’actuelle Tunisie est également répertorié. Il s’agit des Maxitani, dont Hiarbas en était le chef, peut-être plus que le « roi ». Dans le même article cité précédemment, on lit que : « on a reconnu récemment dans ces Maxitani le nom, à peine déformé, des habitants d’un territoire proche de Carthage, le pagus Muxi, qui, sous une forme romanisée, est l’héritage d’une circonscription territoriale punique (J. Desanges, 1967). […] Ainsi, le récit légendaire véhicule encore les réalités d’une coexistence politique, aux origines de Carthage, entre les fondateurs de la colonie venus d’Orient et une souveraineté libyenne ».
La romanisation du terme « Maxitani », utilisée par l’historien Justin soulevait quelques questions. La linguistique donne une explication plus conforme à la réalité du terrain. Le site Inumiden[11] a publié un article paru dans la revue ‘L’Africa romana‘ sur ce sujet. En résumé, ce mot serait une transcription ethnonyme de Mazirh, en d’autres termes l’appellation véritable d’Amazigh, mot par lequel les Imazighen (pl. des ‘Berbères’) se définissent. « Les savants, depuis la fin du XIXe siècle à ce jour, s’accordent à voir dans cet ethnonyme les Μάζυες d’Hécatée, les Μάξυες d’Hérodote, les Maxitani de Justin et les Mazikes d’Eustathe sujets du roi Iarbas I, contemporain de la fondation de Carthage ».[…]
10.4.Tunis, antérieure à la fondation de Carthage. ll semblerait en outre que le site actuel de la ville de Tunis ait été antérieur à la fondation de Carthage puisqu’il faisait partie du territoire des Maxitani . « Tunis était une cité de la tribu des Maxitani » fondée par un peuple autochtone et dont le nom « aurait donc une racine berbère, plus ancienne que la colonisation phénicienne. Cette racine reliée au verbe berbère « ens » signifie le lieu où l’on arrive pour passer la nuit… »[12] Toutefois ce terme de « campement » ou de « bivouac » pourrait également venir de « tinast » désignant une « clé de fertilité ».
10.5.Les sites libyco-puniques.
Un grand nombre de sites archéologiques de Tunisie étaient numides avant de devenir puniques. 10.5.1.C’est le cas par exemple de Mactaris (aujourd’hui Maktar). Dans un numéro hors-série de la revue trimestrielle L’Archéologue[13], il est dit que : « le nom est d’origine punique, mais sa fondation est due aux Numides et remonte au 3e siècle av. J.-C. La cité s’associe aux Puniques et reçut de nombreux réfugiés après la chute de Carthage. »
10.5.2.Le site romain de Thurburbo Majus[14] était « déjà occupé par les Berbères et les Puniques, comme le montre le changement de locataires des temples où Saturne remplace Baal-Hammon et Junon-Astarté ».
10.5.3.Dans le sud tunisien, Gafsa (l’antique Capsa) était un ville numide. La région présente la particularité d’être à l’origine des Capsiens, « des populations de type méditerranéen[15] » distinctes de celles des hommes de Mechta el Arbi. Jusqu’à la découverte récente de l’Homo Sapiens, les anthropologues pensaient qu’il s’agissait des deux seuls types humains du Maghreb.
10.5.4.Au nord de la Tunisie, le site romain de Dougga est protégé par l’Unesco. Son nom libyque d’origine était Thugga « dont la racine, TBG signifie « protéger ». […] Un temple à Baal-Hammon, des stèles, des inscriptions puniques montrent une symbiose entre Berbères et Carthaginois[16] ». Thugga présente un intérêt particulier au regard des Numides. Dans un article de l’Encyclopédie Berbère, qui lui est consacré, Gabriel Camps[17] explique qu’il s’agit « d’une cité numide antérieure à la domination romaine » . Car avant cela, ajoute-t-il, « le site avait été déjà occupé comme l’indique la nécropole de dolmens s’étendant sur le plateau juste au-delà des remparts numides. » Par ailleurs, Thugga possède un mausolée du IIIe-IIe siècle av. J.C. (le mausolée d’Ateban) que l’on pense être dédié à Massinissa, et qui surtout « portait deux inscriptions, l’une en punique, l’autre en libyque, rapportant le même texte, ce qui permit d’établir la valeur des lettres de l’alphabet libyque. » Qui plus est, d’autres inscriptions libyques et puniques ont été trouvées, permettant d’attester que « l’organisation municipale de Dougga » était « originale et différente de celle de Carthage et des autres villes puniques. »
10.6.Kerkouane. À ce stade du récit consacré aux Numides et à leur intégration aux Carthaginois, il convient de revenir plus en détails au site de Kerkouane, étudié par l’historien tunisien Mohamed Fantar. Il souligne deux aspects majeurs. Tout d’abord, l’étymologie fait référence à la contrée amazighe du Cap Bon. En second lieu, le site archéologique a révélé un profond amalgame entre les Carthaginois et les Numides, justifiant ainsi pleinement le terme du métissage « punique ».
Ces vestiges, également classés par l’Unesco[18] méritent qu’on s’y attarde pour plusieurs raisons. D’une part, parce qu’il s’agit des seules constructions authentiquement puniques qu’il soit possible de voir. D’autre part, parce que la reconstitution des fouilles a permis d’établir à quel point la fusion entre Puniques et Numides était bien réelle.
Au cours de la première guerre punique (entre 264-241 av. J.-C.), une flotte romaine, venue de Sicile, débarque à Kélibia (ancienne Clypea). « S’étant installées dans la région, les troupes romaines la ravagèrent : c’est alors que fut probablement détruite la ville appelée Kerkouane sur le cap Bon[19] ». De toute évidence, la cité de Kerkouane a été abandonnée et le site est alors tombé dans l’oubli. Comme aucune autre altération n’a été apportée, les archéologues ont donc pu étudier les restes d’une authentique cité punique. Le professeur M’Hamed Hassine Fantar[20], spécialiste de la civilisation punique à l’université de Tunis, fait état d’un certain nombre de remarques consacrées à ce site.
10.6.1.La chronologie historique a ainsi été établie. « La documentation disponible permet, d’ores et déjà, de tracer le profil d’une cité punique telle qu’elle se présentait au cap Bon entre la fin du IVe siècle et la première moitié du IIIe siècle avant J.-C. ». « Quant à la fin de la cité, elle correspondrait au milieu du IIIe siècle avant J.-C., hypothèse créditée par le matériel archéologique du niveau d’abandon ». « Nous avons donc, au cap Bon, le profil d’une cité punique précisément datée. La chance de l’archéologue, pour ce cas précis, réside dans l’abandon du site après sa destruction ».
10.6.2.L’historien donne également de précieuses informations sur la toponymie du lieu et l’environnement numide de la région du cap Bon. « Avant qu’elle ne soit irriguée par la culture punique, la région semble avoir été habitée par des tribus libyques. […] On peut saisir les traces de leurs origines autochtones dans la toponymie qui s’avère foncièrement libyque ; la plupart des noms des lieux, villes, villages, cours d’eau, champs, etc., appartiennent au substrat de la berbérité : Taguerdouch, Tafelloune, Tazoghrane, Tazerka, Taouzdra, etc. […] La cité punique de Kerkouane semble avoir, elle-aussi, porté un toponyme d’origine libyque : nous croyons l’avoir reconnu dans le lieu dit Tamezrat. Une ville berbère des Matmata, en Tunisie du Sud-Est, porte ce même toponyme ».
10.6.3.Les fouilles ont également permis de confirmer la présence d’une population autochtone confirmant ainsi le métissage établi. « En ce qui concerne le fonds de la population, il y a des indices qui favoriseraient une forte composante libyque : programmes architecturaux, notamment la disposition en enfilade, certaines pratiques funéraires, comme l’usage de l’ocre rouge, et surtout l’inhumation en décubitus latéral contracté ».
10.7.Le métissage et la place des autochtones à l’apogée de la puissance carthaginoise. On aborde ici le processus d’une lente mutation sociologique. On a vu comment les Phéniciens d’Afrique ont développé une culture originale au contact des autochtones pour devenir ce qu’il est convenu d’appeler la civilisation punique. En réalité, les Carthaginois et les Numides auraient pu garder, chacun de leur côté, des spécificités propres sans pour autant se fondre les uns dans les autres. Or, on observe qu’il y a eu une véritable fusion, née forcément d’une complémentarité sans doute nécessaire. Tant et si bien qu’il semble même presque anachronique de parler à ce stade de Numides et de Puniques. Bien que ce terme n’ait pas été systématiquement employé, on pourrait plutôt évoquer une véritable culture lybico-punique. Ce phénomène d’intégration n’a pas été forcé ni politiquement, ni spirituellement. Il s’est instauré petit à petit par commodité. Il apparaît plus tardivement vers la fin du Ve siècle ou au début du IVe siècle av. J.-C.
Dans l’Histoire de la Tunisie, Habib Boularès[21] écrit : « On est conduit à constater que la politique sociale pratiquée par Carthage a abouti à la naissance de ce que les historiens de l’Antiquité appellent la population libyco-punique. L’intégration est si vraie qu’il est difficile de dire si les habitants de Kirkouan, de Dougga ou, plus tard, l’empereur romain Septime Sévère originaire de Leptis Magna, étaient des Puniques ou des Berbères. »
Au départ, il y a eu un métissage familial, fruit de mariages mixtes. « Carthage va, néanmoins, marquer profondément ce territoire de sa culture. Les mariages mixtes paraissent avoir été fréquents, et de nombreux princes berbères portent des noms typiquement puniques[22]. »
Au cours d’une interview, le professeur M’hamed Fantar[23] s’exprime sur ce sujet : « La civilisation carthaginoise est le produit d’une hybridation. L’élément phénicien s’est mélangé à l’élément autochtone, qui apparaît sous le nom de « libou », « les Libyens ». Cet élément libyen se retrouve dans l’onomastique carthaginoise. Certains parents donnent à leur fils le nom de Lubi et à leur fille le nom de Lubat, autrement dit « le libyen » ou « la libyenne ». […] Il est par conséquent certain que l’élément autochtone participe de l’identité carthaginoise. »
L’élément familial n’est pas le seul responsable de ce phénomène d’intégration. Il y a eu d’autres complémentarités comme celle du commerce extérieur (punique) et du commerce intérieur (numide) ; d’une agriculture régionale pourvoyant aux premières nécessités alimentaires. Et puis, au fur et à mesure de la montée en puissance de Carthage, il y a eu un besoin militaire justifiant ainsi, la prépondérance d’un vaste bataillon de mercenaires dans lequel, les Numides jouaient un rôle essentiel. Ce qui fait dire à M’Hamed Fantar[24] que : « c’est en intégrant l’élément africain que Carthage est devenue puissante et a pu faire ses conquêtes en Méditerranée. »
Pour mieux illustrer cet aspect sociologique, il suffit d’évoquer la dynastie des Barcides. Certaines sources mentionnent de manière succincte l’épouse d’Amilcar, père d’Hannibal, sans véritablement en dire plus à son sujet. Toutefois, Habib Boularès[25], quant à lui, affirme que : « la famille Barca, d’Amilcar et de Hannibal, avait du sang berbère dans les veines. Elle n’était sans doute pas une exception. »
Phéniciens | Puniques | ||
Puniques | Numides/Libyens | Libyco-punique |
10.8.Le relais commercial numide. Il existait un commerce intérieur (à l’encontre du commerce extérieur des Carthaginois à la recherche des métaux précieux et d’autres denrées), mais aussi un commerce transsaharien , sans doute par l’intermédiaire des Garamantes.
Étant donné que les Carthaginois étaient principalement un peuple de marins aux activités commerciales intenses, ils s’appuyaient naturellement sur les Numides pour amener jusqu’aux côtes les denrées qu’ils exportaient ensuite en Méditerranée occidentale. Ces produits comportaient entre autres des animaux sauvages, des œufs et des plumes d’autruche, de l’ivoire. Peut-être même de l’or et des épices venant de l’Afrique de l’Ouest. Le Sahara existait déjà, mais il y avait encore des poches de verdure suffisantes pour permettre un commerce transsaharien via le Fezzan, le Tassili n’Ajjer, le Hoggar et le Tibesti. C’était vraisemblablement le rôle des Garamantes (originaires de Cadama, au Fezzan). Or ce peuple libyque, dont on sait encore assez peu de choses, conduisait des chars, lui permettant de couvrir de grandes distances.
L’Afrique du Nord possédait un vaste cheptel d’animaux sauvages, tels que les lions, les crocodiles, les gazelles, les autruches, et une race d’éléphants plus petite que les grands éléphants africains[26].
Les Numides jouaient un rôle tout aussi important dans la chaîne alimentaire. Ils apportaient aux Carthaginois les produits de la terre qu’ils cultivaient, notamment dans la zone du cap Bon propice aux cultures fermières. Ce rôle était absolument fondamental au bien-être de la colonie carthaginoise.
10.9.L’agriculture. Parmi les produits locaux exportés par les Carthaginois, des amphores retrouvées ont révélé principalement trois produits : l’huile, le vin et les poissons. Il s’agit là d’une autre caractéristique due à la richesse de l’arrière-pays. « Les Puniques étaient également de très bons agriculteurs[27]. » Essentiellement concentrée dans la zone du cap Bon, l’agriculture comportait essentiellement trois volets : les céréales, la vigne et l’élevage. M.G. Amadasi Guzzo précise que « la renommée de Carthage dans le domaine technique des cultures et de l’élevage est attestée par le fameux traité de Magon, qui fut le seul ouvrage des bibliothèques de la ville à être traduit[28]. » Elle ajoute que « ces terres étaient exploitées et cultivées par Carthage de manière soit directe soit indirecte. La culture des céréales, bien adaptée au type de terrain et au régime des pluies de cette région, était probablement confiée aux Libyens, tandis que les propriétaires puniques s’occupaient plus directement de productions plus spécialisées, comme l’arboriculture et la vigne[29]. » L’huile était déjà un autre produit local important. « Un bel exemple de villa dans les faubourgs – (de Carthage) – où l’on produisait en particulier de l’huile, a été fouillée à Gamarth par Mhamed Hassine Fantar[30]. » On note également que l’effigie tunisienne du poisson date vraisemblablement de cette époque.
10.10.L’ouverture méditerranéenne. Le commerce maritime, les différents comptoirs puniques en Méditerranée occidentale ou sur les côtes atlantiques au-delà des colonnes d’Hercule, comme les expéditions militaires, ont nécessairement favorisé une ouverture sur d’autres cultures méditerranéennes, comme par exemple, celle des Étrusques. Cet aspect nous paraît d’autant plus intéressant qu’il justifie l’origine et les influences d’une symbolique amazighe caractérisant l’art berbère. « Avec Carthage la Berbérie a été intégrée au monde méditerranéen, et elle a connu par elle une civilisation orientale assouplie bientôt par l’hellénisme[31] ».
10.11.L’influence grecque. De même que les Phéniciens et les Grecs avaient tissé des liens culturels et mercantiles étroits, les Puniques se sont peu à peu hellénisés, du moins sur un plan artistique et culturel, même si l’ennemi principal de Carthage était, au départ du moins, Syracuse, ville grecque de la Sicile voisine. La population étrangère de Carthage comptait de nombreux Grecs. On s’aperçoit que plusieurs constructions carthaginoises avaient suivi un modèle grec, comme l’usage du stuc, du chapiteau dorique ou ionique, évoqués par M.G Amadasi Guzzo[32]. Hannibal lui-même, avait eu une éducation grecque et on sait qu’il maîtrisait parfaitement la langue grecque.
Malgré tout, Charles-André Julien[33] pense que ce n’est « que par l’intermédiaire des Phéniciens que les Berbères connurent l’architecture, l’industrie et les cultes grecs. »
M’Hamed Hassine Fantar[34] apporte un commentaire qui va dans le sens d’une intégration culturelle. « Sur certaines stèles, on rencontre des images grecques, par exemple les colonnes doriques et ioniques, le fronton triangulaire. Dans le domaine du sacré, il y a entre autres motifs d’origine grecque, le caducée et le canthare. Ces symboles, associés à Hermès, pour le premier, et à Dionysos pour le deuxième, n’attestent pas la présence de dieux grecs dans l’univers religieux des Carthaginois. Il s’agit de deux images que les Carthaginois ont empruntées aux Grecs pour évoquer leurs propres divinités comme Sid et Eshmoun. Les Grecs, d’ailleurs, étaient présents à Carthage. Et nous avons de bonnes raisons de penser qu’ils s’étaient parfaitement fondus dans le creuset carthaginois. »
Cet aspect historique et culturel a son importance quand on tente de percer les inspirations géométriques symboliques de l’art amazigh traditionnel. Il existe vraisemblablement une connexion perpétrée tout d’abord par Carthage, puis ensuite par ses différentes colonies ou zones d’influence.
Le texte écrit sur l’influence libyco-grecque en Afrique du Nord[35] soulignait déjà ce parallèle qui impliquait directement un lien méditerranéen antique.
10.12.Le sol africain. Au fil du temps, et très certainement par les liens noués, Carthage a étendu son territoire d’influence sur le sol africain. Un article de l’Encyclopédie Berbère[36] mentionne que « son histoire proprement africaine commence assez tardivement. C’est le coup d’arrêt porté par les Grecs aux ambitions carthaginoises à Himère en 480 qui incita vraisemblablement la « nouvelle ville » fondée par Tyr à se doter d’un arrière-pays africain, en commençant par s’affranchir du tribut qu’elle payait aux indigènes depuis les origines, si l’on excepte quelques intermittences, notamment au VIe siècle ». Ceci corrobore ce qui a été dit précédemment au sujet de la redevance carthaginoise envers les Numides (Ve siècle av. J.-C.).
Après avoir évoqué les origines lybico-puniques d’Hannibal, voici ce que l’Histoire nous renseigne à son sujet, à son retour de la campagne d’Italie. « Hannibal replié en Afrique choisit la Byzacène comme base d’opérations pour des raisons personnelles — c’était un fief de famille — et stratégiques[37]. » Un deuxième article paru dans l’Encyclopédie Berbère[38] mentionne : « Hannibal débarqua sur la côte du Sahel et prit ses quartiers à Hadrumète* (Sousse), autant pour garder ses distances vis-à-vis de Carthage et d’une coterie qu’il savait hostile en son sénat que pour en mettre entre ses forces, qu’il lui fallait reconstituer, et l’armée de Scipion, qu’il lui faudrait bientôt affronter. » Le site phénicien d’Hadrumète a déjà été évoqué, mais il est fait mention ici : « d’une propriété qu’il avait au bord de la mer, entre Thapsus (Ras Dimass) et Acholla (Henchir Boutria) : peut-être au Ras Kaboudia, qui fait saillie sur cette côte du Sahel tunisien. »
Après plusieurs générations sur le sol africain, l’appartenance des Puniques à la terre africaine a dû avoir un effet d’appartenance au sol. En d’autres termes, le temps, le métissage et l’attachement à une mère nourricière indigène ont forcément facilité une symbiose culturelle.
D’ailleurs, elle se retrouve encore aujourd’hui dans certaines croyances, dans des rites, des expressions du langage, dans des signes symboliques comme vraisemblablement « la main de Fatma » (le ‘Khamsa’) dont l’origine semble être cananéenne.
11.Les autres données historiques.
Le phénomène de l’évolution de la civilisation punique émerge aussi au travers d’un certain nombre d’évolutions historiques justifiées à la fois par un relatif isolement géographique, un contexte culturel plus varié, et surtout en fonction d’une proximité durable avec les Numides.
11.1.La langue. On sait que le phénicien appartient à la famille des langues sémitiques. La langue des Carthaginois a bien sûr été celle de la mère patrie (essentiellement Tyr et Sidon) à ses débuts. Or, cette langue a évolué avec son peuple pour se distinguer et recevoir l’appellation de langue punique. Voici ce que M-G. Amadasi Guzzo[39] écrit sur ce sujet : « Par convention, nous appelons phéniciennes (et phénicien leur langue) les inscriptions qui précèdent l’affirmation de l’hégémonie de Carthage, puniques (et punique leur langue) les inscriptions qui montrent partout un type d’écriture spécifique et certains développements de la langue par rapport à celle de la mère patrie. […] Avec le temps nous percevons des changements proprement occidentaux. »
11.2.Les sources écrites. On se trouve en présence de deux cultures possédant un alphabet distinct. L’alphabet phénicien est chronologiquement le premier. On est encore un peu indécis quant aux origines de l’alphabet libyque. Les écrits puniques ont été brûlés par les Romains. Aucune tradition écrite chez les Libyques, hormis quelques inscriptions dans la pierre. Le papyrus égyptien ne faisait vraisemblablement pas partie du commerce existant alors. Ce qui s’explique aisément en fonction de la distance, bien que ce fut le rôle de la ville phénicienne de Byblos de fabriquer le papyrus [πάπυρος, en grec] destiné à l’Égypte pharaonique. Les hiéroglyphes étaient largement diffusés dans les lieux de culte, les tombes et sur des parchemins de papyrus. Les peuples libyques ont donc laissé des traces écrites essentiellement sur des monuments, comme cela a été découvert à Dougga, par exemple.
11.3.Le bestiaire animal : de l’ovidé au bovidé ? Le bœuf ou taureau d’un côté, le bélier de l’autre : voici deux animaux à cornes dont le symbolisme peut nous éclairer dans le contexte des cultures antiques.
11.3.1.Traditionnellement le bœuf illustre les mythologies méditerranéennes. On a précédemment évoqué le mythe de l’enlèvement d’Europe par Zeus, celui de Cadmos en Grèce, le Minotaure crétois ; un mythe persistant en Méditerranée jusqu’à celui de la tradition de la corrida. Les Phéniciens semblent souscrire aussi à cet engouement pour les bovidés. À Sidon par exemple, on a retrouvé des chapiteaux à l’effigie de taureaux. Associé pour sa force et sa vitalité au monde divin, le bœuf est devenu l’animal offert en sacrifice aux dieux.
Il n’est donc pas impossible qu’il soit à l’origine du mythe de fondation de Carthage (la peau de bœuf) ou encore de la confusion linguistique au sujet de la colline de Byrsa (bœuf, en grec).
11.3.2.Par contre, côté sud, ce serait plutôt le bélier qui jouerait un rôle similaire. Deux exemples répertoriés viennent illustrer cela. Le premier émane de l’Égypte ; le second des gravures rupestres d’Afrique du Nord.
Dans son ouvrage sur Les Symboles de l’Égypte, Christiane Desroches Noblecourt[40] évoque à plusieurs reprises « le bélier divin », cet « animal qui féconde les brebis du troupeau ». Elle cite le temple de Khnoum, sur l’île d’Éléphantine, au niveau de la 1ère cataracte, où il y avait une tête de bélier associée à l’Inondation du Nil qui « de la même manière fécondait l’Égypte ». Elle atteste ensuite que « le bélier est très africain ». Or le bélier de Khnoum est aussi Amon dont le nom signifie « le Un unique ». Plus tard, le culte d’Amon sera associé à celui de Rê, le Soleil, pour devenir Amon-Rê et où Amon représente le Sud et Rê, le Nord, les deux pôles égyptiens.
Il ne faut pas oublier que dans la mythologie égyptienne, il existe également Apis, le taureau sacré. Le lion, comme le taureau, représentent le pharaon. Alors que la vache Hathor est liée au culte de la résurrection. D’un côté, un ovin fécondateur de vie ; de l’autre un bovidé lié à la résurrection.
11.3.3.Dans l’Atlas nord-africain, on a retrouvé un grand nombre de gravures rupestres dites « bélier à sphéroïde ». Dans un article de l’Encyclopédie Berbère, Gabriel Camps[41], mentionne qu’on a tout d’abord fait le lien avec l’Égypte. Or les recherches ont établi que ce n’était pas le cas. « La coiffure des béliers de l’Atlas n’est pas un disque solaire et les représentations égyptiennes situées arbitrairement à l’origine de celles de l’Atlas leur sont postérieures de 2 à 3 millénaires puisque celles-ci appartiennent au Néolithique ancien. » Les scènes dépeignant ces ovidés sont parfois accompagnées d’un homme en position d’orant. « Ces différentes scènes ne permettent pas d’affirmer l’existence d’un culte du bélier. […] Ces béliers sont des animaux parés suivant un rituel assez précis et destiné vraisemblablement à être sacrifiés à la fin d’une cérémonie. »
11.3.4.Avant d’arriver à cette conclusion, Gabriel Camps[42] évoque l’Antiquité égyptienne classique où : « On admettait facilement qu’à la tête du panthéon africain siégeait un dieu suprême, Amon ou Ammon, devenu célèbre dans le monde grec dès le VIe siècle av. J.-C. par son oracle de l’oasis de Siouah. […] Amon dieu-bélier primordial, est devenu dieu solaire par sa fusion avec Râ.»
11.3.5.Et si, en définitive, on revient à l’histoire de Carthage, on retrouve « le dieu Baal-Hammon (dont le nom semble signifier en phénicien le Maître des Brûle-parfum). »
Cette longue digression permet tout d’abord d’asseoir l’origine africaine du bélier qui a été animal de sacrifice avant de devenir une effigie divine. Il ne s’agit nullement d’un culte, sachant que les Égyptiens associaient des divinités symboliques à tête d’animal. Dans le cas précis de Carthage, on a retrouvé des ossements d’ovidés associés / ou en remplacement / à des ossements humains, laissant donc supposer qu’il s’agissait d’offrandes expiatoires.
Il n’est peut-être pas non plus impensable d’évoquer une fusion possible entre le taureau méditerranéen et le bélier africain, dans l’éventualité d’un moule punique.
Dans la mythologie berbère Agurzil (parfois aussi appelé Gurzil), était le dieu de la Guerre à la tête de taureau, fils du dieu Ammon. Le texte intitulé ‘Le Signe de Tanit[43]’ montre comment Ammon et Ba’al sont devenus un seul et même dieu de la triade punique (El /Ba’al-Ammon /Tanit-Astarté).
11.4.Autres divinités. Étant donné que la divinité carthaginoise Tinnit ou Tanit a été présentée séparément, il reste à considérer deux autres divinités qui semblent avoir participé au syncrétisme religieux africain. La première, Baal-Hammon, vient d’être évoquée au paragraphe précédent. La seconde, moins connue, est celle d’un dieu guérisseur assimilé à Esculape.
11.4.1.Il semble utile à ce stade de revenir tout d’abord sur le dieu phénicien Baal, puis sur son pendant punique Baal-Hammon. Dans un article de l’Encyclopédie Berbère[44] consacré à Baal, M’hamed Fantar analyse la racine sémitique B’l, recélant « les notions de force, de puissance, de possession, de domination, de richesse. […] B’l désigne le seigneur, le maître, le propriétaire, le citoyen ou le notable d’une cité comme Maktar. » Ce terme s’applique à « une divinité cananéenne ou phénicienne. » Cette divinité, originaire de Phénicie, est arrivée en Afrique du Nord avec Carthage. Or, on assiste à une sorte de mutation, puisqu’à Carthage, comme dans d’autres cités antiques nord-africaines, le culte de B’l Hammon devient « l’une des plus importantes divinités du panthéon punique[45]. » En évoquant les fouilles du tophet de Carthage, Azedine Beschaouch[46] écrit que ce lieu « est consacré au couple divin suprême, Tanit-Ba’al Hammôn, protecteur de la cité et garant de sa pérennité. […] Pour le « seigneur », qualifié personnellement de « Hammôn » […] il s’agit bien du dieu suprême qui exauce les vœux et assure la prospérité. Aussi après la chute de Carthage, gardera-t-il sa prééminence et son omnipotence dans l’Afrique des Romains, sous le nom de Saturnus, souvent qualifié de magnus (« grand »), dominus (« seigneur »), frugifer (« fécondateur ») ou sacer (« saint »). » Dans le même article de M’Hamed Fantar, cité précédemment en référence, il est dit aussi : « Nous savons que Saturne d’Afrique couvre le B’l punique et que sur la montagne qui domin le golfe de Tunis du côté de Hammam-Lif dans la banliue sud de Tunis, il y avait le culte de Saturne Balcaranensis, transcription de l’expression punique « B’l qrnm », le Seigneur aux deux cornes. » Il est évident que cette dernière remarque se rattache directement à l’ovidé mentionné au chapitre précédent (réf.11.3).
En outre, on sait que l’oasis libyque de Siwa, en Égypte, était le lieu d’un culte célèbre dans l’Antiquité dédié à ce « Seigneur aux deux cornes » appelé Ammon que les Égyptiens et les Grecs connaissaient fort bien ! Du désert occidental égyptien à la Numidie, nous sommes toujours en territoire libyque…
11.4.2.Un deuxième élément semble bien illustrer ce phénomène de syncrétisme religieux sur un fond essentiellement nord-africain. Dans l’ouvrage intitulé La légende de Carthage[47], l’auteur mentionne qu’« Appien rapporte que sur l’acropole ou ”citadelle” de la ville – appelée Byrsa – se trouvait le temple d’une divinité au nom d’Eshmoun, qu’il assimile à Asclépios le dieu grec guérisseur. C’était, nous assure-t-il, le plus grand temple de Carthage. » Il n’est plus possible aux archéologues de retrouver des traces de ce temple, vu les nombreuses modifications apportées à la colline de Byrsa comme le mentionne M-G. Amadasi Guzzo[48]. Toutefois, Nacéra Benseddik, dans deux analyses, l’une publiée dans la revue Persée[49] (CNRS), et l’autre dans l’Encyclopédie Berbère[50], a étudié les nombreux vestiges trouvés concernant Esculape et sa parèdre Hygie. « La Numidie est la province du culte commun d’Esculape et Hygie. Les deux divinités y ont bénéficié d’un culte franchement militaire dans les camps et les villes de garnison, thérapeutique dans les thermes. » [E.B] Le culte grec d’Asklépios [Ἀσκληπιός], parti d’Épidauure, date du IVe siècle av. J.-C. Un certain nombre de figurations (sculpture, monnaie) ont été étudiées et ont révélé certaines différences. « C’est en effet à Esculape que la divinité représentée sur l’aureus africain doit ses formes épaisses et le bâton au serpent, mais c’est à Eshmun qu’elle emprunte son aspect juvénile et les deux serpents ou dragons d’Astarté. Cet exemple remarquable de fusion iconographique entre la divinité phénicienne et le dieu grec est un premier indice de la nature complexe d’Esculape africain. » [E.B.] Sur un bas-relief découvert à Béja, l’un des personnages dénommé Marcugum révèle l’existence suspectée d’une divinité africaine antérieure. « Des divinités – certaines d’importation plus ancienne, à savoir phénicienne, d’autres indigènes -, avaient en charge les problèmes de santé des Africains avant l’introduction d’Aesculapius dans le pays. » […] « Ainsi à la première forme de syncrétisme connue – le syncrétisme libyco-punique – s’est ajoutée une interprétation des cultes libyques, libyco-punique et punique sous une forme romaine, ce qui donne une idée de la difficulté de reconnaître ces différents niveaux dans la personnalité d’Esculape africain. Outre son nom libyque de Macurgum, la divinité guérisseuse du bas-relief de Béja nous livre une image qui ne manque pas d’originalité. » [E.B.]
Ceci a également une implication directe. En faisant l’analyse de l’anneau de cheville chaoui[51], la question du symbolisme du serpent avait été soulevée. Son origine lointaine semble être la suivante : « De même que des aspects essentiels d’Eshmun ont facilité son assimilation à Asklepios, il faudra bien admettre que des éléments symboliques de l’imaginaire collectif africain, dont le serpent, attachés à Macurgum, dieu libyque de la santé, ont concouru à le remplacer par le dieu gréco-romain Aesculapius. » [E.B]
Au terme d’une recherche sur l’existence d’un dieu guérisseur libyque, Nacéra Benseddik conclue que : « L’iconographie d’Esculape et d’Hygie, en Afrique, est d’origine héllénique. […] La documentation iconographique, déjà disponible, […] se révèle riche de formes d’expression qui sont autant d’attitudes religieuses propres à l’Afrique. Parmi celles-ci, on ne soulignera jamais assez l’emprunt non passif aux autres cultures. » [Persée]
Le texte consacré aux « Grecs et Libyques : La nature bivalente des contacts de la haute antiquité[52] », évoquait déjà ce syncrétisme dans lequel Libyques et Numides ont joué un rôle non négligeable, mais souvent escamoté. Il convient donc de restaurer cette fonction de catalyseur encore souvent sous-jacente.
11.5.L’inhumation : le passage de l’incinération à l’enterrement. Les rites funéraires sont une bonne illustration du syncrétisme carthaginois.
On se souvient que le mythe de fondation de Qart-Hadash se termine par une immolation par le feu. Elisha préfère mettre fin à ses jours plutôt que d’accepter la main du chef numide Hiarbas. Cet acte s’intègre au mythe car les Phéniciens avaient pour habitude d’incinérer leurs morts, au même titre d’ailleurs que les Grecs.
Or, les Numides, quant à eux, avaient recours aux rites d’enterrement. C’est la raison pour laquelle on retrouve des nécropoles ou des dolmens aux temps préhistoriques ; et à cette époque de l’Antiquité, des cénotaphes, des mausolées, comme celui d’Asteban à Dougga (Tunisie), ou encore de véritables monuments, comme le Médracen – ”le mausolée royal de Maurétanie” – près de Cherchell (Algérie).
On s’aperçoit que par le biais d’un métissage progressif, les Puniques abandonnent les rites phéniciens d’incinération pour adopter ceux de l’enterrement numide. Voici ce que Maria Giulia Amadasi Guzzo[53], professeur à l’Université de Rome, écrit à ce sujet : « Le rite le mieux documenté pour l’époque haute est celui de l’inhumation. […] L’incinération est minoritaire et paraît concentrée dans certains secteurs (Douimès, colline de Junon et Byrsa). Il a été supposé que les défunts incinérés à cette période devaient avoir conservé un lien spécifique avec la mère patrie. La prépondérance de l’inhumation, au contraire, proviendrait d’un mélange important de la population avec les indigènes libyens (Lancel, 1992, 67-68). »
En évoquant « la Sicile phénicienne » vers la moitié du VIe siècle av. J.-C., M.G. Amadasi Guzzo[54] ajoute également : « C’est d’ailleurs à partir de cette époque que l’artisanat de la Sicile phénicienne présente des liens plus stricts avec Carthage et que des rites funéraires semblables à ceux d’Afrique du Nord s’affirment (inhumation à la place de l’incinération). »
Qu’en reste-t-il ?
Si le Tunisien moderne se distingue des autres pays nord-africains, c’est peut-être avant tout
parce que ses racines sont profondément ancrées en milieu punique. Dans le contexte carthaginois, le terme de punique, désigne à juste titre la mixité entre Numides et Phéniciens de Carthage. Il est vrai que viendront s’y ajouter Hébreux, Romains, Vandales, Arabes et Turcs, pour ne pas énumérer d’autres encore plus récents : Français, Italiens, Maltais. De par sa position tampon, à la fois terrestre et maritime, la Tunisie a eu le malheur – à moins qu’il s’agisse, de bonheur – d’être à la croisée de tous les chemins ! Qui viendrait se plaindre aujourd’hui de la douceur et de la gentillesse des Tunisiens, voire de leur originalité ? L’idée qu’une poignée de conquérants arabes aient pu changer les traits morphologiques de toute une communauté, appartient au fantasme, pour ne pas parler de mythe. Le seul point d’unification, il est vrai, a été l’Islam. Une étude de l’ADN du Tunisien entreprise par National Geographic[55] permet d’en clarifier statistiquement l’origine morphologique. On constate que le génome méditerranéen est dominant à 62%, suivi d’une influence subsaharienne de 19%, et nord-européenne à 6%. [”This reference population is based on samples collected from people native to Tunisia, in North Africa. Tunisia’s location on the Mediterranean Sea in North Africa contributes to its broad genetic diversity. Predominantly Mediterranean (62%), there is also clearly European and African influence (6% Northern European and 19% sub-Saharan African). The 10% Southwest Asian component likely arrived in two waves, one with the arrival of agriculture from the Middle East beginning around 8,000 years ago, and also with the Islamic conquest of the 7th century. The source of the 2% Southeast Asian component is a mystery”.]
La langue numide appartient au groupe des langues berbères. Par contre, le phénicien, l’hébreu, l’arabe et même le maltais sont des langues sémitiques. (réf. Salem Chaker sur ce sujet).
Par contre, les Grecs, les Romains, les Vandales ou les Turcs, sont des Indo-Européens. Il y a là déjà un joli mixage linguistique ! On peut comprendre que certains aient voulu, par idéologie et par simplicité, réduire ce puzzle à sa plus simple expression ! L’Histoire, la Science, le définissent tout autrement, souvent à l’encontre de la religion ou de la politique.
On voit donc à quel point tout s’imbrique et fusionne dans la mouvance antique. Cela souligne encore une fois l’importance jouée par les ‘Libyens’ au sein de ce creuset culturel et religieux du bassin méditerranéen. Il faut bien convenir que la notion politique de « colonialisme » n’avait strictement aucune valeur dans les mentalités, du moins dans le sens auquel il se rattache aujourd’hui. Bien au contraire, l’Histoire montre à quel point ces rencontres portaient un germe fécondant, même si dans bien des cas, on n’échappait pas aux frictions conflictuelles, parfois guerrières, inhérentes à l’espèce humaine. Il faut voir dans ce signe l’une des forces majeures de l’ère antique.
L’approche adoptée dans cette étude tend à souligner l’importance de cette mixité culturelle qui est à la base des échanges ayant eu lieu durant cette période de la haute Antiquité préromaine. On a vu comment les Phéniciens ont influencé les Grecs, comment les Puniques ont pu jouer un rôle de catalyseur pour les Numides, et comment enfin ce peuple libyque d’alors a pu également contribuer à forger son empreinte sur le monde grec et punique.
Les Puniques ont disparu ou se sont fondés dans la population locale. Ce n’est pas le cas des racines amazighes originelles. À l’ouest et dans le sud de la Tunisie, il existe toujours des poches berbérophones. Il est vrai, vu les dimensions modestes du pays, que le métissage a été plus profond en Tunisie que partout ailleurs. Claude Lévi-Strauss se féliciterait, sans doute, de ce trait sociologique allant à l’encontre de toute forme de racisme, et louant les bénéfices du métissage. « La civilisation implique la coexistence de cultures offrant entre elles le maximum de diversité[56]. » Faut-il y voir là un des germes émanant du « Printemps arabe » parti justement de Tunisie ?
Il faut espérer, comme l’indiquait déjà Gabriel Camps, que ces considérations apportent des précisions supplémentaires pour faire en sorte que les Berbères/Imazighen ne soient plus « les oubliés de l’Histoire » et que l’importance de leur rôle dans l’Antiquité soit rétablie à sa juste place.
Christian Sorand
[1] S. Bertrandy, « Cirta », Encyclopédie berbère, 13 | Chèvre – Columnatien, Aix-en-Provence, Edisud, 1994, p. 1964-1977
[2] Les Berbères, Jean Déjeux, PUF, 2017
[3] Claude Lepelley, http://www.universalis.fr/encyclopedie/numides/
[4] Histoire des Berbères, Ibn Khaldoun, Paris, Geuthner, 1925.
[5] Symboles de l’Égypte, Christiane Desroches Noblecourt, Desclée de Brouwer, Livre de Poche, 2004
[6] Grecs et Libyques, Christian Sorand, https://www.inumiden.com/grecs-libyques-nature-bivalente-contacts-de-haute-antiquite/
[7] Les Berbères, Jean Servier, PUF, Que Sais-je ?, 2017
[8] Les Numides et la civilisation punique, Gabriel Camps, Persée, 1979
[9] Carthage, M-G Amadasi Guzzo, PUF, Que Sais-je ?, 2007, p.62
[10] « Hiarbas », G. Camps, URL : http://encyclopedieberbere.revues.org/1728
[11] https://www.inumiden.com/on-designait-fameux-berberes-vrai-nom/
[12] Aux origines du nom deTunis, http://www.webdo.tn/2015/12/04/aux-origines-du-nom-de-tunis/
[13] Tunisie antique, L’Archéologue nº8, juin-juillet-août 2018, p.49.
[14] Ibid. p.25.
[15] Encyclopédie Berbère nºXII, Capsa [C19] / Capsiens [C20], ISBN : 2-85744-201-7 et 2-85744-581-4
[16] Tunisie antique, L’Archéologue nº8, juin-juillet-août 2018, p.56.
[17] G.Camps, « Dougga (antique Thugga) », Encyclopédie Berbère nºXVI, Édisud, Aix-en-Provence, 1995, pp.2522-27
[18] Cité punique de Kerkouane et sa nécropole, UNESCO, https://whc.unesco.org/fr/list/332/
[19] Carthage, M-G Amadasi Guzzo, PUF, Que Sais-je ?, 2007, p.48.
[20] M.-H. Fantar, « Kerkouane », in Encyclopédie Berbère, URL : http://encyclopedieberbere.revues.org/1340
[21] Histoire de la Tunisie, Les Grandes dates de la préhistoire à la révolution, Habib Boularès, Cérès Éditions, Tunis 2012, ISBN 8873-19-754-2
[22] Ibid.
[23] Les Cahiers de Science et Vie, nº104 avril-mai 2008, Interview de M ‘Hamed Hassine Fantar
[24] Ibid.
[25] Ibid.
[26] D’où venaient les éléphants puniques?, Sorand, C, https://www.inumiden.com/dou-venaient-les-elephants-puniques/
[27] Carthage, M-G Amadasi Guzzo, PUF, Que Sais-je ?, 2007, p.100.
[28] Ibid., p.102
[29] Ibid., p.101
[30] Ibid., p.101
[31] Histoire de l’Afrique du nord, Charles-André Julien, Payot, 1972, p.94
[32] Carthage, M-G Amadasi Guzzo, PUF, Que Sais-je ?, 2007, p.104.
[33] Histoire de l’Afrique du Nord, Charles-André Julien, Payot, Paris, 1972, p.55.
[34] Carthage, la cité qui fit trembler Rome, M’Hamed Hassine Fantar, Les Cahiers de Science et Vie nº104, avril-mai 2008
[35] C.Sorand : https://www.inumiden.com/grecs-libyques-nature-bivalente-contacts-de-haute-antiquite/
[36] « Carthage », S. Lancel, G.-Ch. Picard, N. Duval et E.B., URL : http://encyclopedieberbere.revues.org/2070
[37] Hannibal, Raymond Chevalier, Persée, 1967.
[38] Hannibal, S.Lancel, Encyclopédie Berbère, édisud, Aix-en-Provence, 2012
[39] Carthage, M-G Amadasi Guzzo, PUF, Que Sais-je ?, 2007, p.120.
[40] Symboles de l’Égypte, Christiane Desroches Noblecourt, Desclée de Brouwer, 2004.
[41] Le Bélier à Sphéroïde, Gabriel Camps, Encyclopédie Berbère nºIX, B54, pp.1417-1433
[42] Ibid.
[43] Le signe de Tanit, Sorand, C. : https://www.inumiden.com/signe-de-tanit/
[44] Baal (B’l), M’hamed Fantar, Encyclopédie Berbère nºIX, Édisud 1991, Aix-en-Provence, pp.1289-1291.
[45] Ibid.
[46] La légende de Carthage, Azedine Beschaouch, Découvertes Gallimard, 1993, ISBN : 2-07-053212-7, pp.80-81
[47] Ibid., p.81
[48] Carthage, M-G Amadasi Guzzo, PUF, Que Sais-je ?, 2007, p.68.
[49] Esculape et Hygie en Afrique : classicisme et originalité, Nacéra Benseddik, Persée, 1993.
[50] Esculape africain, N.Benseddik, Encyclopédie Berbère, 1997, http://encyclopedieberbere.revues.org/2001
[51] L’anneau de cheville (Ardif ou Akhelkal), C.Sorand, https://www.inumiden.com/lanneau-de-cheville-ardif-ou-akhelkal/
[52] C.Sorand, https://www.inumiden.com/grecs-libyques-nature-bivalente-contacts-de-haute-antiquite/
[53] Carthage, M-G Amadasi Guzzo, PUF, Que Sais-je ?, 2007, pp.78-79
[54] Carthage, M-G Amadasi Guzzo, PUF, Que Sais-je ?, 2007, p.23
[55] Tunisian genome, National Geographic : https://genographic.nationalgeographic.com/reference-populations/
[56] Race et Histoire, Claude Lévi-Strauss, Denoël, Folio essais nº58, 1987, ISBN:92-3-202475-6, p.77.
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Carthage, La cité qui fit trembler Rome, Les Cahiers de Science et Vie, nº104 avril-mai 2008, Interview de M ‘Hamed Hassine Fantar
- b) Sites Internet:
Baal-Hammon : http://www.cliolamuse.com/spip.php?article129
National Geographic-Regional ancestry/Tunisian : https://genographic.nationalgeographic.com/reference-populations/
Les Phéniciens : http://antikforever.com/Syrie-Palestine/Phenicien%20Cananeen/phenicien.htm
Tanit, déesse-mère berbère de Carthage : https://matricien.org/matriarcat-religion/paganisme/tanit/
Documentaires :
Dans le secret des pierres, Carthage ville nouvelle, TV5, Dailymotion : https://www.dailymotion.com/video/xdx41n_dans-le-secret-des-pierres-carthage_travel
Histoire de Carthage en Tunisie, ARTE, YouTube : https://www.youtube.com/watch?v=KcYlh64Dchc