La légende de Bourek : L’ancêtre des chaouis
Cette légende est attestée depuis 1890, Bourek , Bourch , ou encore Mayou , a été évoqué pour la première fois par les officiers géomètres français qui fixèrent les limites des douars de l’Algérie et qui sont entré dans le massif auressien à cette époque . Ces géomètres français sont les vrais auteurs de la « Monographie de l’Aurès ». Mais la parenté du livre fut attribuée à leur chef Raoul-Julien-François de Lartigue comme il était d’usage à cette époque.
Germaine Tillion au cours de sa mission a recueillie plusieurs versions de ce mythe de Bourek dans le nord du massif auressien :
« Il y avait à Ilfen (ou Guelfen suivant les dialectes) un douar installé au-dessous d’un rocher. Là , vivait un homme âgé. Il avait deux filles et l’une d’elles se nommait Aïcha Tabahloult (La Folle). D’autres disent qu’elle se nommait Aïcha El Bahloula . Vingt un maghrébin écrivain. Elle lui dit “Écris à mon amant”. Il lui répondit ” Apporte un œuf”. Elle l’apporta. Il écrivit sur l’œuf et dit ” De semaine en semaine, surveille-le”. Elle s’en retourna chez elle et surveilla l’œuf .L’œuf s’ouvrit. Il en sorti un serpent ; elle le porta dans une fente de rocher. Ensuite elle attendit. Elle en fut bien punie. Un jour qu’elle passa près du rocher elle y trouva un grand serpent, un dragon, qui sortait de la fente où elle l’avait déposée quand il était petit. Elle prit peur et s’enfuit. Le serpent la suit et, la nuit , il fait le tour du douar , les chiens aboient , la femme se lève et fait lever son mari . Il lui dit “Qu’y a-t-il ?” Elle répondit “Un grand serpent vient dans notre douar pour tout dévorer ” . L’homme se lève, il selle sa jument ; la femme lui dit “J’irai avec toi, moi et les enfants”. Il monte sur sa jument et se rend à Ilfen. Là était Bourch vieillard aveugle. Ils crient, les serviteurs de Bourch accourent: ”Qu’y a-t-il ?’’ ” Un dragon dévore notre douar “. On va au dragon ; on le trouve en effet qui dévorait le douar. On le chasse au sommet du Kef. On jette sur lui de grandes pierres et des arbres, jusqu’à ce qu’on le couvre. On allume du feu ; la flamme s’élève jusqu’au ciel. Le serpent se fond et une graisse épaisse coule du bûcher. C’était un jour d’été. Les abeilles viennent butiner cette graisse et en font du miel. Lorsque le moment est venu de couper les ruches, on récolte beaucoup de miel. On l’entasse dans de paniers ; mais les gens n’en mangent pas. Ils craignent de mourir. Puis ils prennent la résolution d’en faire manger Bourch disant “Donnons-le à Bourch qui est vieux et aveugle, s’il meurt peu importe”. Ils lui en donnent un peu.Il le mange, il se frotte les yeux ; il voit. Il dit “Ajoutez un peu” .Ils lui en donnent un grand morceau, il mange, il se frotte les yeux, il est guéri. Aïcha Tabahloult lui dit ” Ils ont voulu te faire mourir”. Il lui répondit : “Fais lever mes fils, qu’ils viennent”. Les fils arrivent. Le père leur dit :’’Je ne demande pas la Diya (prix du sang), donnez-moi Aïcha.’’ Ils lui disent :”Volontiers”. Ils la lui donnèrent et elle enfanta de nombreux enfants dont la descendance constitua les tribus qui peuplent aujourd’hui l’Aurès ».
Chaque grand village du nord de l’Aurès avait ses propres versions de la même histoire.
A Tagoust , le vieux bourch ( Bourek )se voyait attribuer trois femmes , Touba (mère des Touaba , Aïth Daoudh) , Aba ( mère des Aïth Abdhi ) , Aïcha Tabahloult (mère des gens de Nara et de Menaâ) .
Jugurtha Hanachi