Firmus, fils de Nubel, Imperator et Rex ?
L’historiographie se partage sur l’interprétation de la figure de Firmus, « usurpateur » ou « roi maure » ; ce débat traduit les divergences voire les ambiguïtés des sources. En replaçant cet épisode dans le contexte d’une Afrique du nord multilingue et polyglotte (latin, punique, libyque), on formulera l’hypothèse qu’aux deux dénominations latines de rex et d’imperator a pu correspondre un seul terme libyque, celui de MNKD. Or ce terme a pu se charger, au cours de la « rébellion », de connotations différentes, plutôt celle d’imperator au début, plutôt celle de rex ensuite. Cette enquête amène à reprendre l’interprétation globale de la « rébellion », en y introduisant l’hypothèse d’une périodisation.
La « rébellion » de Firmus en Maurétanie césarienne (372-375 ap. J.- C.)1 a donné lieu à nombre de tentatives d’interprétation. Sans entrer dans les détails, on pourrait citer l’alternative formulée par T. Kotula, « usurpateur » ou « roi maure », avec un choix en faveur de la seconde expression 2 , la subtile appréciation de J. F. Matthews, « quelque chose entre le soulèvement tribal et l’usurpation », avec davantage d’arguments en faveur du soulèvement 3 et la prise de position tranchée d’A. Demandt, en faveur de l’usurpation 4 . Ces interprétations traduisent les divergences voire les ambiguïtés des sources. Sans vouloir reprendre tous les aspects de ce dossier complexe, dont le dernier état, à ma connaissance, a été fourni par J. W. Drijvers 5 , je voudrais focaliser l’interrogation sur les dénominations des titres et fonctions des protagonistes, dans toutes les langues pratiquées à l’époque en Afrique du nord. En effet, la « rébellion » a été soutenue dès l’origine, en sus de populations tribales et autres 6 , par quelques unités de l’armée romaine puis s’est étendue, d’après Ammien Marcellin, à de très nombreuses tribus (nationes), différentes par les coutumes et les langues 7 . De fait, cette région est multilingue : libyque et latin y sont en usage ; et si, dans la Numidie voisine, le punique est encore également pratiqué 8 , il est possible que se soit encore maintenu au IVe siècle en Césarienne une culture punique 9 . Alors même que nos sources sont uniquement impériales et surtout latines, on peut s’interroger, dans le cadre de la problématique de l’interpretatio, sur les correspondants en libyque voire en punique des termes utilisés en latin par les acteurs et par les sources pour désigner les titres et fonctions des protagonistes 10.
À ma connaissance, cette voie n’a guère été explorée par l’historiographie. Denis Lengrand avait commencé de s’y engager il y a une quinzaine d’années, sans développer pour autant son argumentation 11. Il voyait dans les fonctions de Firmus, commandant à des principes gentis maures, une position qui aurait été analogue, en punique, à celle d’un RBT HMMLKT, c’est-à-dire d’un « chef » (RBT) des « princes » (HMMLKT), en se référant à l’« inscription funéraire » punique du roi des Massyles Micipsa (148-118 av. J.-C.). Celle-ci qualifierait en effet Micipsa de deux façons différentes : MLK (par rapport aux Massyles) et, selon l’interprétation suivie par D. Lengrand, à la suite de J.-G. Février et G. Camps, aussi comme RBT HMMLKT, c’est-à-dire « chef » (RBT) des « princes » (HMMLKT)12 . Firmus, successeur de son père Nubel, dont la généalogie connue proclamerait sa fidélité au monde indigène 13 , aurait, de la même façon que celui-ci, exercé sur ses congentiles une autorité détenue par son clan familial sur un ensemble de tribus ; son acceptation du diadème 14 et son port (dans la tradition d’un Massinissa) d’un manteau militaire rouge (sagus puniceus) 15 , ne devraient être pas compris comme des marques d’usurpation mais auraient symbolisé cette tradition « maure ». L’hypothèse de D. Lengrand s’inscrivait donc dans l’un des termes de l’alternative de T. Kotula mais la précisait en lui donnant une expression linguistique qui traduirait une mémoire longue des institutions locales.
Dans la mesure où elle prenait fortement en compte le contexte « non-romain », la démarche méthodologique de D. Lengrand était intéressante, même si elle ne se référait pas explicitement aux dénominations libyques ; elle n’a d’ailleurs peut-être pas reçu toute l’attention nécessaire. Or ce problème mérite d’être repris, en l’élargissant à l’ensemble des protagonistes, en réexaminant aussi bien l’apport de « l’inscription funéraire » de Micipsa que celui d’autres texte puniques et libyques et en s’interrogeant sur les relations entre les dénominations possibles libyques et puniques et les dénominations connues gréco-latines.
L’enquête, apparemment ciblée sur une question bien spécifique, est peut-être susceptible d’apporter, outre son intérêt propre, un éclairage sur le déroulement et la signification des événements.
1. Dénomination et contenu des titres et fonctions d’après les sources grécolatines
Considérations générales
Pour ce qui est de l’Afrique du nord, on doit à E. Frézouls, Ph. Leveau, Cl. Lepelley, M. Bénabou, G. Camps, Y. Modéran 16 des apports importants sur l’emploi des titres utilisés par les notables des tribus. Avant les époques vandale et byzantine, les titres les plus fréquemment cités sont ceux de principes, notables dans la dépendance de Rome, dont le titre est officiellement reconnu, ainsi que de praefecti, titre qui, à l’époque tardive, désigne des notables « bénéficiant de la confiance des représentants de l’empereur » 17 .
En revanche, le terme rex est peu utilisé. Il peut tout d’abord qualifier, de façon officielle, des chefs ennemis vaincus. Une inscription datée du règne de Valérien mentionne trois reges baquates 18, tués par l’armée romaine ; une inscription de Lambèse mentionne des combats contre quatre reges bavares vers 26019. Plus généralement, à l’époque d’Augustin, il renvoie à des peuples non pacifiés, extérieurs aux frontières (romanae fines), à la différence de ceux qui ont reçu des praefecti « et qui commencent à devenir chrétiens » 20 . De façon plutôt exceptionnelle, une inscription de Volubilis en 277 mentionne un Iulius Matif, rex des Baquates21, lié à l’Empire, alors qu’avant et après lui c’est le titre de princeps qui est porté. Matif a été promu à la royauté, mais cela n’a pu être fait sans l’aveu de Rome ; son fils Nuffusi reste un simple princeps : « le titre royal n’apparaît donc pas comme le symbole de l’indépendance baquate à l’égard de Rome ; mais il traduit certainement un accroissement de rayonnement territorial ou de puissance politique » 22. Ce cas paraît toutefois isolé.
En ce qui concerne le terme regulus, la seule attestation, à ma connaissance (en dehors du récit d’Ammien (infra), pour l’époque impériale, se trouve dans un texte adressé le 28 décembre 364 par Valentinien et Valens à Victor, duc d’Egypte, qui est relatif à des gentiles dont les reguli envoient à des lettres à l’empereur 23 ; mais ces gentiles sont-ils « établis en Egypte » comme le pense Y. Modéran24 ou extérieurs au territoire impérial (même s’il paraît probable qu’ils relèvent, au sens large, de l’imperium romanum ?) On ne saurait inférer d’un tel texte que ces reguli auraient été nommés ou promus par l’Empire ; ils apparaissent en revanche comme des interlocuteurs de celui-ci dans un contexte de paix. Si le texte de 364 utilise le terme dans un document envoyé au duc d’Égypte, nous ne savons pas si celui-ci était effectivement employé par les autorités impériales pour s’adresser à de tels personnages. Il semble donc que l’Empire ait très peu employé de termes « royaux » (rex ou regulus) pour s’adresser à des notables d’Afrique dans sa dépendance, alors même que ce qualificatif pouvait être attribué à des chefs de tribu hostiles et/ou externes.
On peut confronter ces données avec l’emploi de telles dominations par Ammien Marcellin pour qualifier des chefs de barbares européens, souvent ennemis et parfois clients.
Le terme rex est fréquemment utilisé pour les ennemis25, mais Ammien introduit des subdivisions, construisant une hiérarchie de reges, de reguli et de subreguli, les regales devant être des membres des « familles royales » : à la bataille de Strasbourg, outre les reges, il y a des regales et des optimates 26 ; le roi alaman Hortar convie à dîner des reges, des regales et des reguli 27 ; parmi les Sarmates, il y a des regales, des subreguli et des optimates. 28 Par ailleurs l’empereur Constance II fait du jeune regalis Zizais un rex29 . La représentation hiérarchique d’Ammien repose sans doute en partie sur son appréciation des rapports de forces et ne nous renseigne guère sur les structures internes des sociétés ; en revanche, la désignation d’un rex par l’Empire, qui inscrit celui-ci dans sa clientèle, ne saurait être mise en cause.
On traduit traditionnellement regulus pas « roîtelet », « petit roi », voire « jeune roi ». Or, S. Fanning a récemment proposé de le traduire par « co-ruler » 30. Mais si son argumentation montre que, dans certains cas, des reguli (« petits rois ou « jeunes rois ») peuvent être des « co-princes » (ainsi dans un premier temps, d’après Salluste, Jugurtha, Hiempsal et Adherbal 31), cela ne démontre en rien que tel serait toujours le cas ; je reviendrai, infra, sur l’application de cette hypothèse au cas de Nubel. En revanche, la capacité de l’Empire à créer des reges dévoués pour diriger des gentes dominées est ancienne et relève des pratiques clientélaires ; elle est illustrée par un passage de Tite Live montrant que Rome a transformé en Espagne des reguli en reges 32 : des « petits rois » locaux deviennent des reges clients reconnus par l’Empire. Mais si l’Empire accorde la dignité de rex, on ne le voit pas conférer celle de regulus 33 : quel serait le prestige de tels « roîtelets », clients de Rome, auprès de vrais « rois » indépendants barbares, adversaires de celle-ci ? C’eût été d’une insigne maladresse. L’Empire peut transformer un regalis comme Zizais en rex et des reguli en reges, mais pas qualifier comme tels ou créer des reguli-clients. En revanche, un historien peut librement qualifier un chef de gens, fût-il un rex, de regulus, en appliquant sa propre grille de lecture à la société considérée ; c’est en sens qu’on peut dire qu’un même individu pourrait être qualifié tantôt de rex (reconnu comme tel officiellement par l’Empire, qu’il soit ami ou ennemi) tantôt de regulus (regardé comme tel de facto par l’Empire ou par une source, qu’il soit ami ou ennemi). On a donc deux types de reges : d’une part, des adversaires de l’Empire, d’autre part, certains partenaires reconnus voire promus ; mais, pour l’Afrique, il ne semble pas que, dans ce dernier cas, le qualificatif de rex ait été répandu : c’est princeps qui est utilisé à cette époque, de tels principes pouvant devenir praefecti. En revanche, il apparaît normal de dénommer ainsi un chef ennemi, sans que cela signifie nécessairement que celui-ci ait été d’une grande importance.
L’apport d’Ammien Marcellin, XXIX, 5
— Principes, praefecti, ductor, optimas
Plusieurs personnages sont des « grands second rôles ». Le récit d’Ammien emploie le verbe ductare pour qualifier la position de Dius et de Mascizel à la tête de leur tribu 34 , principes pour définir les chefs des Mazices 35 , praefectus gentis pour le « préfet » de cette tribu 36 , ductor pour un chef des Mazices 37 , optimas pour un autre chef des Mazices 38. Aux tribus dont il traverse le territoire, Théodose donne des praefecti fidèles 39. La représentation qu’a Ammien des chefs de tribu apparaît assez floue : on ne sait pas exactement quelles sont les positions respectives des principes, ductores et optimates, ni comment ils se situent par rapport à un rex comme Igmacen ni à un uelut regulus comme Nubel.
– Un rex : Igmacen
Igmacen est dit être rex des Isaflenses 40 . Il apparaît lors de l’ultime phase de l’affaire, commençant par donner asile et appui à Firmus puis le trahissant. Après le suicide de celui-ci, il remet son cadavre au chef de l’armée impériale, Théodose. La tribu des Isaflenses se situe en principe en territoire impérial, dans les massifs de Kabylie, mais le récit d’Ammien donne l’impression d’une situation externe à la romanité ; on en est en fait là dans une région montagneuse que les Romains se sont contentés d’entourer de postes et de colonies de vétérans, mais sans véritablement l’administrer, pas même par un préfet 41 . D’ailleurs les Isaflenses sont qualifiés de barbari 42 et Théodose leur déclare la guerre 43, tout comme à une gens externa ; on n’est pas là dans le registre d’une « rébellion », mais plutôt dans celui d’une guerre classique contre des barbares. Leur chef apparaît comme un roi puissant et peu informé des réalités impériales, puisqu’il dit ne pas savoir qui est Théodose ; on n’est même pas sûr qu’il s’exprime en latin : certes, c’est sans doute en cette langue qu’il interpelle le magister militum, lors de leur première rencontre, puisqu’il s’est avancé vers lui apparemment seul et sans interprète 44 ; de même, lors de leur seconde rencontre, Ammien indique explicitement qu’il s’avance seul vers Théodose ; mais c’est pour lui demander de quérir Masilla, et c’est par ce dernier que se conclura un accord secret. Il est donc possible que le rex n’ait eu qu’une connaissance limitée du latin et que l’essentiel des discussions ait eu lieu dans cette langue entre Théodose et Masilla.
Il reste que cette description traduit d’abord une représentation, celle d’Ammien, mais aussi, plus généralement celle de l’Empire ; elle vise à montrer en Igmacen les traits de l’extériorité à la civilisation romaine, alors même qu’il serait capable d’opposer à Théodose une armée de vingt mille combattants 45. Preuve supplémentaire en est que Théodose, pour se faire comprendre du roi qui lui demande quel était son rang (locus), se présente, non pas selon son grade, comme magister equitum de l’empereur/imperator Valentinien mais comme comes Valentiniani orbis terrarum domini (« comte = compagnon de Valentinien le maître du monde »)46 . Igmacen est donc invité non pas à obéir à un officier d’un empereur romain mais à un proche du dominateur universel : non explicitement inclus dans un imperium Romanum qui serait limité, il n’échappe pas en revanche à l’universel orbis terrarum dont Valentinien est censé être le maître.
– Un uelut regulus : Nubel
Nubel est cité deux fois : il est dénommé, en prologue au récit, comme étant uelut regulus potentissimus per nationes Mauricas 47 ; et l’on apprend, au cours du récit, qu’il est né dans la Iubalena natio, dans une région, d’après Ammien, de hautes montagnes et de gorges tortueuses 48. On a proposé de l’identifier avec Flavius Nuvel, dédicant à Rusguniae d’une basilique où se trouvait un fragment de la Sainte Croix, de rang perfectissime, ancien praeprositus des equites armigeri, ancien comte, époux d’une Colecia honestissima femina 49 , référence qui permettrait de l’inscrire dans une double structure hiérarchique, maure et romaine ; cette hypothèse, adoptée notamment par G. Camps et D. Lengrand 50 , est fragile et, sans doute à bon droit, contestée 51. On évitera, par précaution méthodologique, de l’intégrer dans l’argumentation et je ne m’engagerai donc pas dans un débat sur ce point.
Ammien ne lui donne pas exactement le titre de regulus, comme on le comprend trop souvent, mais écrit uelut regulus potentissimus. Selon S. Fanning, l’expression regulus potentissimus serait contradictoire, si l’on donnait à regulus le sens qu’on lui prête habituellement (et ce serait selon lui à tort) de « roîtelet » : un oxymore ; regulus voudrait dire ici, comme ailleurs, un « co-ruler » 52 . J’ai indiqué, supra, que cette hypothèse, de façon générale, me paraissait fragile ; dans le cas précis de Nubel, elle confine à l’absurde: on ne voit pas de qui Nubel pourrait être le « co-ruler »; il apparaît au contraire comme un grand notable qui ne partage son influence avec personne. Quant à considérer que le terme regulus serait bien ici un titre officiellement porté, de même nature que rex, c’est confondre une titulature de caractère officiel avec la position d’un individu estimée par un historien par rapport à des nationes et par rapport à l’Empire, rendue de façon comparative par l’adverbe uelut. Dans cette expression, c’est uelut qui est peut-être le mot le plus important : Nubel se comporte « comme un petit roi », comme un « petit chef », et ce uelut traduit le dédain de l’historien. Il est très peu probable que des chefs prennent d’eux-mêmes un tel titre, car il ne serait nullement de leur intérêt de se parer d’un diminutif ; et, inversement (supra) l’Empire n’aurait pas intérêt non plus à accorder un titre qui serait aussi dévalué à des chefs placés dans sa clientèle, sauf à les exposer à être en état d’infériorité par rapport à des reges indépendants, ce qui serait le contraire de l’effet recherché. En revanche, par rapport aux nationes Mauricae, un tel uelut regulus peut bien dit être potentissimus, c’est-à-dire disposer d’une puissance et d’une influence qui iraient au-delà de sa tribu d’origine ; et par rapport à l’Empire, il aspirait sans doute à être reconnu comme rex.
G. Camps, qui identifiait les deux Nubel, avait jugé qu’il s’agissait d’une famille qui ajoute à ses fonctions administratives et militaires, de caractère romain, des domaines très étendus et une suzeraineté mal définie sur plusieurs tribus maures, en particulier celle des Iubaleni, qui, au cours de la révolte, finirent par proclamer roi Firmus 53 ; et D. Lengrand estimait qu’il faudrait entendre en fait rex et comprendre le per au sens de « par-dessus », « sur l’ensemble » : Nubel aurait dominé des tribus maures, tout en étant né chez les Iubaleni, mais ne serait pas rex des Iubaleni ; lui-même, et après lui son fils Firmus, disposeraient d’un pouvoir qui ne dépendait pas d’une tribu particulière 54 . Peut-être n’était-il, aux yeux de Rome, qu’un princeps (des Iubaleni) cherchant à acquérir la dignité de rex (sur un ensemble de tribus).
Si l’on compare les présentations que fait Ammien des positions d’Igmacen et de Nubel, on voit qu’il se place dans deux logiques différentes. Dans le cas d’Igmacen, il rend compte de la situation d’un chef ennemi qui a tous les attributs de l’extériorité à la romanité. Dans le cas de Nubel, il s’emploie à décrire, de façon légèrement méprisante, la position que prétend avoir un notable maure, appuyé sur un réseau d’influence. Nubel a dû se comporter « comme un petit roi », dans le but de se faire reconnaître un jour comme rex, comme cela avait été le cas pour un Iulius Matif.
La descendance de Nubel
Selon Ammien, Nubel avait des fils, les uns légitimes, les autres nés de concubines 55 , ainsi qu’au moins une fille, Cyria 56. Nous connaissons les noms de plusieurs de ses fils, sans que l’on sache leur ordre de naissance : outre Firmus, qui est le seul à avoir un nom de consonance latine, Zammac 57, qu’on identifie avec Salmaces, dominus du fundus Petrensis 58 , Gildon 59, Mascizel 60, Dius 61, Mazuca 62 . J.-F. Matthews s’est demandé si Zammac n’était pas né d’une concubine et Firmus de l’épouse légitime 63, mais cela reste une hypothèse. Le fait qu’Ammien n’ait pas compris que Zammac et Salmaces ne faisait qu’un peut être dû à l’existence de deux sources d’informations différentes 64. Peut-être le qualificatif de « frère » appliqué à Dius et Mascizel et celui de « sœur » à Cyria traduiraient-ils une parenté large au sein d’une « famille étendue » 65 . Zammac ne reçoit pas d’autre dénomination que celle de dominus de son fundus, mais une inscription montre que ce domaine (praedium) était aussi une forteresse (praesidium), permettant aux peuples voisins (finitimae gentes) « cessant la guerre » de rejoindre les « traités de Zammac » (in tua foedera) 66 : il apparaît comme un personnage important. Mascizel et Dius commandent (ductabant) chacun une gens, le premier les Tydenses, le second les Massinissenses67 . Quant à Cyria, elle apparaît comme l’animatrice de la coalition des nationes de langues et coutumes différentes, réunies contre Théodose 68.
L’onomastique n’est peut-être pas sans signification. Firmus renvoie à la solidité physique et morale. C’est un cognomen qu’on trouve, mais modérément, dans l’armée, et un peu en Afrique 69 . Un tel choix peut avoir un sens politique et traduire une manifestation de loyauté envers les autorités impériales. Si Gildon se voit investi de missions importantes par Théodose, c’est sans que l’on connaisse son titre ou son grade ; en revanche, on reconnaît en son nom le terme libyque GLD, moderne aguellid, qui désigne indifféremment un roi ou toutes sortes de responsables (infra) 70, et qui est aussi utilisé comme anthroponyme : on connaît, en Cyrénaïque, une Gildan, à Taucheiria, par une inscription grecque 71, ainsi qu’un évêque Gildon, cité dans la correspondance d’Augustin 72 . Toutefois le fait, pour un chef, de nommer ainsi l’un de ses fils peut traduire sa volonté de l’inscrire dans la tradition des puissantes familles maures, en marquant la place éminente qui pourrait lui revenir par un tel choix.
Deux noms, Firmus et Gidon, ont donc en commun de mettre en évidence une affirmation de supériorité : les deux frères, futurs ennemis, sont dénommés « le solide » (en latin) et « le chef » (en libyque). On peut s’interroger sur le moment où de tels noms ont été reçus : dans la prime enfance, au cours de l’adolescence, alors que les qualités manifestées pouvaient les justifier, voire plus tardivement ? Faut-il émettre l’hypothèse que le choix d’un nom latin a pu traduire une volonté d’assurer le choix d’un successeur, ou, inversement, que le nom de « Gildon », par la référence à GLD, pouvait laisser transparaître une autre préférence ?
La succession de Nubel
Nous ne savons pas comment était prévue la succession de Nubel ; on en est donc réduit aux hypothèses. Firmus tue Zammac. Craignant d’être condamné à mort et ne parvenant pas à faire valoir des arguments en sa faveur auprès de l’autorité impériale, il se « rebelle » contre celle-ci (ab imperii dicione desciuit) 73. Il faut d’ailleurs noter que, par la suite, Firmus, tout en reconnaissant les faits, continuera de se défendre, sans qu’Ammien apporte d’éclaircissements sur ses arguments 74, et adoptera un temps une attitude de suppliant 75, jusqu’à ce que le magister equitum Théodose, persuadé, à tort ou à raison, de sa duplicité, adopte un comportement intransigeant 76 .
Il apparaît peu probable que Zammac (peut-être illégitime ?) était le successeur désigné. On peut formuler l’hypothèse que Firmus (peut-être légitime ?) ait été ou se soit considéré comme le successeur de son père et que Zammac ait tenté de lui ravir indûment la place : cela expliquerait que Firmus ait tenté de plaider sa bonne foi auprès des autorités ; il n’aurait fait que se défendre pour récupérer le bien qu’il estimait être le sien. Ce bien devait comporter le pouvoir politique dont jouissait Nubel, c’est-à-dire cette forme de prééminence qu’indique l’expression uelut regulus dans le récit d’Ammien. Dans cette affaire, les frères dont les noms nous sont connus et sa sœur le soutiennent, à l’exception d’un seul, Gildon, qui se met au service de Théodose 77. On ne peut exclure que Gildon, un GLD en puissance, ait pu avoir des prétentions à la succession. Quant au contenu de la succession, il doit notamment porter sur la place qu’occupait Nubel par rapport aux Mauricae nationes, ou du moins un certain nombre d’entre elles, une position uelut regulus potentissimus, et peut-être déjà une aspiration à être reconnu comme rex, ou, au moins, comme un princeps important.
La qualification de Firmus dans les sources gréco-latines Dans le récit d’Ammien, Firmus est qualifié par une terminologie qui relève apparemment du registre du brigandage et de la rébellion : latro 78 , rebellis 79 ; toutefois latro est employé par l’Histoire Auguste dans le sens d’usurpateur 80 et Ammien lui-même qualifie les « usurpateurs » Julien et Procope de rebellis 81 . Le fait que Firmus soit dénommé perduellis 82 n’est pas incompatible avec une usurpation, ce terme étant aussi employé par Ammien pour des « usurpateurs », Silvanus, Julien et Procope 83 . Les autres sources se sont partagées en deux groupes 84 . Orose appelle Firmus rex 85 et Augustin rex barbarus 86 mais la Passio Sanctae Salsae l’accuse d’avoir voulu s’emparer de l’autorité impériale 87 et Zosime écrit que les Libyens lui donnèrent la pourpre impériale et le proclamèrent empereur 88. À partir de là s’est ouvert le débat bien connu : roi maure ou usurpateur ? Faut-il voir dans le passage de l’Histoire Auguste consacré au « tyran » Firmus, personnage fictif censé s’être emparé de l’Égypte au temps d’Aurélien, un écho déformé de ces discussions ? Le débat érudit qui ouvre le Quadrige des tyrans oppose en effet ceux qui le définissent comme un « brigand » (latrunculus) et ceux pour lesquels c’est un princeps (en fait tyrannus), ayant porté la pourpre, fait battre monnaie et se dénommant, dans ses édits, en grec, autocrator 89 . Faudrait-il voir se dessiner la figure du « roi maure » derrière le latrunculus et celle de l’usurpateur derrière le prétendu autocrator ?
Les marques du pouvoir : torques et manteau rouge
On apprend, mais c’est de manière incidente, qu’un tribun de la quatrième cohorte des archers avait posé son collier (torques) sur la tête de Firmus « en guise de diadème » (pro diademate) 90 et que, lors d’un ultime affrontement avec les troupes impériales, Firmus est apparu revêtu d’un « manteau rouge vif » (sagus puniceus) 91, pouvant évoquer la pourpre impériale, et qu’il a harangué les soldats adverses en les incitant à trahir Théodose et à le livrer. Ces deux références ne sont pas décisives en elles-mêmes et ont pu être exploitées dans un sens ou dans un autre.
On doit d’abord s’interroger sur la cérémonie de remise du torques par un tribun romain. T. Kotula a mis en doute la réalité de cet épisode et a proposé qu’il ait constitué un doublet du récit par Ammien de la proclamation de Julien comme Auguste à Paris : il ne pourrait s’agir que d’une fiction écrite par un historien peu au fait des réalités de l’Afrique 92 . Mais une telle remise en cause est problématique. En effet Ammien ne lui consacre pas un passage spécifique mais la rapporte de façon incidente à propos du châtiment, bien réel, infligé aux tribuns « traîtres », dont « l’un avait posé un collier sur la tête de Firmus en guise de diadème » 93 ; on comprendrait mal qu’un châtiment bien réel soit venu sanctionner un acte imaginaire, accompli par l’un des tribuns en présence des autres. Cet épisode s’est passé de toute évidence au cours de la première phase de la rébellion, avant que l’incendie ne se propage à de « très nombreuses tribus » 94 et que son caractère « maure » ne soit encore amplifié, avant même l’arrivée de Théodose en Afrique. Firmus est alors soutenu, entre autres, par des soldats romains : des equites de la quatrième cohorte des Sagittarii, des Constantianorum pedites (de la Legio Flavia Victrix Constantiniana) peut-être aussi d’autres déserteurs 95 . Nous ne savons pas où cette cérémonie a eu lieu, mais elle n’a pu que se dérouler dans la partie la plus romanisée de la Maurétanie césarienne, embrasée la première 96 . Toutefois, il est très possible que les soldats de l’armée impériale qui ont alors soutenu Firmus aient été largement d’origine maure et aient pratiqué le libyque, le recrutement local ayant joué un rôle important dans la composition de l’armée d’Afrique 97.
Point n’est d’ailleurs besoin qu’il y ait eu un grand nombre de soldats pour que cette cérémonie ait eu lieu : il suffit qu’aient été présents tout ou partie des unités mentionnées par Ammien (ce qui n’exclut pas des Maures des tribus, pour lesquels elle pouvait revêtir une autre signification). Il est probable qu’elle ait été en partie improvisée, comme l’ensemble du début de la rébellion, qui montre beaucoup d’impréparation, et il est même possible que Firmus n’ait pas lui-même été à l’initiative du geste.
En revanche, il n’est pas assuré que la remise du torques pro diademate s’inscrive nécessairement dans un contexte romain. D. Lengrand a proposé de l’inscrire dans la tradition maure, les rois africains portant le diadème en s’inspirant de la tradition hellénistique, comme le montrent leurs monnaies 98. Même si c’est par des soldats romains qu’il a été remis, on doit prendre en compte l’hypothèse de leur origine maure ; une double signification, maure et romaine, du port du torques par Firmus n’est pas exclue.
Quant au manteau rouge, il peut lui aussi recevoir deux interprétations. En faveur d’une interprétation « romaine », il y a de bons arguments. Il est ostensiblement porté par un Firmus qui se préoccupe moins de combattre les soldats de Théodose que de les exhorter (sans doute en latin mais peut-être aussi en libyque) à le livrer. Le port d’un tel manteau à ce moment-là constitue un message politique destiné aux soldats de l’armée impériale et l’on est, dans une certaine mesure, « entre Romains ». Outre les unités mentionnées supra, il n’est pas douteux que des soldats romains persistèrent à soutenir Firmus. Certes, Ammien utilise l’expression desertoribus paucis, ce qui pourrait faire croire qu’il y en eut peu ; mais paucis se rapporte aux seuls déserteurs que Théodose fait brûler vifs, tandis que d’autres sont mutilés99. Il faudrait donc se garder de sous-estimer le nombre de ces déserteurs. En outre, la violence brutale des châtiments de Théodose envers eux se comprend aussi à titre préventif et laisse transparaître des loyautés vacillantes. Il est significatif qu’après cette ultime exhortation de Firmus, des soldats abandonnèrent le combat (deserere proelium) 100 et ce, alors qu’ils connaissaient les punitions infligées par Théodose aux traîtres et aux mous (il avait notamment fait mettre à mort un tribun des archers non pour trahison mais pour n’avoir pas voulu combattre ni exhorter ses troupes à le faire) 101 . On ne saurait donc minimiser le capital de sympathie dont avait longtemps pu jouir Firmus auprès d’une partie de l’armée romaine.
Mais là aussi, on peut proposer une interprétation « maure », ce manteau pouvant s’inscrire dans une tradition remontant à Massinissa 102. L’emploi par Ammien de l’adjectif puniceus pourrait viser à peindre, à tort ou à raison, en Firmus une figure « non-romaine ». À strictement parler, puniceus désigne en effet une couleur rouge écarlate et n’est pas synonyme de purpureus1 03 . Et le port d’un manteau couleur pourpre est attesté pour Massinissa 104 et pour Juba Ier 105 . On voit que, comme pour le torques, on pourrait ne pas exclure une double signification, maure et romaine 106 .
2. La dénomination des fonctions de commandement en libyque et en punique
Ces questions ont fait l’objet de travaux substantiels, même si subsistent des interrogations ; je renverrais, pour l’essentiel, aux synthèses de J.- G. Février, G. Camps, S. Chaker107, dont je résume ici les principales conclusions. En libyque, existent deux termes pour désigner les fonctions de commandement : GLD (auquel correspond dans les inscriptions bilingues le punique HMMLKT) et MNKD (auquel correspond peut-être le punique MLK). GLD a pu désigner des responsables de toutes natures : roi, prince, magistrats de cité etc…et MNKD s’appliquer à des chefs militaires 108 . Ces termes peuvent être (supra) aussi utilisés comme noms propres.
G. Camps s’était demandé si, en libyque, après le règne de Micipsa, le MNKD avait pu se substituer, pour désigner le roi, dans la dynastie numide à un GLD qui serait tombé en désuétude, parce que moins prestigieux : GLD pouvait en effet désigner aussi des responsables de rang modeste. Il relevait en effet que Micipsa était dit, sur une stèle de Thigibba, en libyque, MNKD. Or, sur l’« inscription funéraire » de Cherchell, en punique, si celui-ci y est bien mentionné comme MLK (= MNKD libyque), il serait aussi, selon G. Camps, RBT HMMLKT, c’est-à-dire « chef (ou maître) des princes » (à moins qu’il ne faille entendre « chef des cités », HMMLKT pouvant désigner les magistrats supérieurs des cités)109. Cela pourrait signifier, en punique, un début d’abandon de HMMLKT (= GLD en libyque) au profit du seul MLK (= MNKD en libyque) pour désigner le roi, HMMLKT (= GLD) ne signifiant plus que simple « prince », chef de tribu. Tel était, on l’a vu, le fondement de l’hypothèse de D. Lengrand, faisant de Firmus, dans la tradition numide, un « chef des principes gentis », RBT HMMLKT en punique.
Cette reconstruction n’est toutefois pas communément admise. Le premier déchiffreur de l’« inscription funéraire » de Micipsa, Ph. Berger, n’avait pas relié RBT à HMMLKT 110 , et, récemment, K. Jongeling et R. M. Kerr ont repris la même interprétation 111 . L’expression « chef des princes » serait donc erronée et HHMLKT devrait être pris en tant que tel pour désigner Micipsa On aurait donc, dans la même inscription, pour le « roi » Micipsa, deux termes : MLK et HMMLKT. MLK rattachant très clairement Micipsa à son peuple, les Massyles, l’hypothèse de Ph. Berger était que HMMLKT qualifiait son pouvoir royal, la « royauté en soi ». On ne saurait donc déduire de l’inscription une hiérarchie MLK (roi)/ HMMLKT (prince), en punique, et, par transitivité, MNKD/GLD en libyque. L’hypothèse de D. Lengrand voyant dans Firmus un roi commandant à des chefs de tribu en écho à la position institutionnelle de Micipsa exprimée en punique pourrait donc être fragilisée.
G. Camps lui-même n’excluait pas que les deux couples de termes aient pu correspondre à des aspects différents de la fonction royale, un sens plutôt civil et religieux (pour HHMLKT/GLD) et militaire (pour MLK/MNKD)112. Quant à S. Chaker, qui met en évidence le lien GLD/aguellid, il estime que le sens actuel et médiéval d’aguellid est très fort : « un monarque très puissant, souvent même Dieu », alors que la signification en libyque de GLD paraît plus ouverte 113. La question des rapports entre les fonctions est donc extrêmement complexe. Peut-être faudrait-il voir dans le MNKD surtout un chef d’armée, et pas nécessairement un roi 114.
Or, à l’époque impériale, la fonction de MNKD est aussi connue dans le cadre de l’imperium Romanum. En effet, ce terme est désormais utilisé pour rendre la fonction impériale, plus précisément le terme imperator. Dans des inscriptions libyques d’époque impériale, MNKD se comprend comme imperator 115 et sur une inscription punique de Leptis Magna, datée de 8 av. J.-C., le terme MYNKD correspond assurément à imperator116 et se rapporte à l’empereur Auguste. Ce MYNDKD est une reprise de MNKD : pour rendre imperator, le libyque comme le punique adopteraient donc ce même terme. Selon S. Chaker, le terme MNKD, au départ faiblement spécialisé, aurait, avec le renforcement de la puissance romaine, impulsé ce resserrement sémantique, alors que GLD serait resté le terme traditionnel pour désigner les royautés indigènes 117. Pour les chefs de tribus dans l’orbite impériale, on ne voit guère, en effet, comme possibilité, que GLD ; il apparaîtrait difficilement imaginable qu’un chef de tribu maure sous contrôle impérial ait pu se prévaloir du titre de MNKD, porté par l’empereur romain. En revanche, on ne voit pas pourquoi des chefs de tribu maures hors du contrôle impérial se seraient interdits de prendre, ou de continuer à prendre ce titre de MNKD, même si nous pouvons nous interroger sur la continuité de son emploi. Si les GLD sont soumis au MNKD, cela ne pourrait donc être le cas que dans le cadre des structures impériales : GLD locaux, MNKD imperator. Hors de ce cadre, nous sommes ramenés aux interrogations précédentes sur les rapports entre les termes MNKD et GLD : sont-ils hiérarchisés, renvoient-ils à des définitions différentes ? Il paraît impossible de répondre à cette question.
3. Hypothèses sur les correspondances entre dénominations latines et libyques dans l’affaire Firmus
Comment étaient dénommés en libyque les chefs de tribu relevant de l’autorité de Rome, qui nous sont connus comme princeps, voire ductor ou optimas ? Dès lors que MNKD est employé pour désigner l’imperator, il ne peut être porté par des chefs en principe soumis à l’imperium romanum. Le plus vraisemblable est que ceux-ci ont continué à être dénommés GLD, avec éventuellement la mention du groupe commandé, et cela devait valoir pour Nubel, quelle qu’ait été sa prétention à dominer d’autres chefs de nationes et de gentes : il pourrait n’avoir été qu’un GLD parmi d’autres, mais un peu plus puissant que d’autres, en aucun cas un GLD « des Maures ». En revanche, on ne peut exclure qu’un rex comme Igmacen, dont on a vu l’éloignement par rapport à la romanité, ait pu se dénommer MNKD. Si l’on met cette hypothèse en relation avec la manière dont Théodose s’est présenté à lui, comme un comes du maître du monde, Valentinien, on comprendrait encore mieux que le magister militum ait évité l’expression d’imperator pour qualifier l’empereur : comme imperator se traduit en libyque par MNKD, titre possible d’Igmacen, il aurait été politiquement et psychologiquement nécessaire d’employer une expression latine beaucoup plus forte, au-delà du terme imperator, faisant valoir la notion de maîtrise du monde, et peut-être traduite en libyque. Celle-ci placerait d’emblée Valentinien au-dessus d’Igmacen et non à son niveau comme cela aurait été le cas pour imperator/MNKD.
Que pouvait-il en être du « rebelle » Firmus ? Celui-ci n’avait rien prémédité et ce sont, dans une large mesure, les événements qui ont commandé. Il s’est trouvé sans doute enserré dans un réseau de définitions et de dénominations qu’il ne pouvait dominer. La dénomination la plus adéquate pour lui en libyque était probablement celle de MNKD : un chef d’armée rassemblant plusieurs tribus, qu’on l’entende par « commandant militaire » ou, en un sens plus général, par « roi », fonctions pouvant se rendre aux yeux des Romains par rex ; GLD aurait été mal approprié, parce qu’il ne marquait sans doute pas la même prééminence sur diverses nationes, tout en pouvant prêter à confusion, car il aurait renvoyé à l’anthroponyme de son propre frère, Gildon, passé dans le camp adverse. Le libyque MNKD (compréhensible par des punicophones), s’il peut se comprendre comme « chef maure » et donc rex, traduit aussi le terme latin imperator 118 . Or, s’il était naturel, pour des Maures des tribus, de voir en Firmus d’abord un chef militaire, MNKD, correspondant en latin à un rex, comme le décrivent Augustin et Orose, des soldats de l’armée impériale ralliés à lui ont pu le considérer comme un imperator. En revanche, on peut s’interroger sur la définition précise de ce dernier terme : un véritable « empereur », ou, surtout s’il s’agit de soldats de l’armée impériale d’origine maure parlant le libyque, un simple équivalent en latin du MNKD ?
Les termes latins officiels pour définir le pouvoir suprême sont augustus et caesar ; princeps est d’un emploi large et volontiers littéraire ; dans la titulature impériale, dominus noster tend, à ce moment-là, à supplanter imperator caesar 119, mais imperator continue d’être employé lorsqu’on désigne le prince 120 ou qu’on s’adresse à lui 121 . Les soldats de l’armée impériale auraient-ils employé, au moment de la proclamation, toute la titulature en usage, y compris augustus ? Se serait-on contenté, lors de cette improvisation, du titre d’imperator ? Et en quel sens ? Firmus aurait-t-il eu vraiment conscience qu’il se plaçait en situation d’usurpateur, alors que son comportement ultérieur de suppliant ne fait pas voir un « usurpateur » d’envergure ?
Deux points doivent être examinés. Le premier est celui de la composition de l’assistance lors de la remise du torques ; le second est le sens qu’aurait pu avoir le terme imperator.
Dans le premier cas, deux hypothèses sont possibles.
1) Seuls des soldats des unités citées par Ammien auraient été présents, le latin aurait été utilisé, mais l’on peut formuler l’hypothèse d’un emploi du libyque par des militaires bilingues : le terme imperator aurait assurément été utilisé mais peut-être aussi MNKD par des soldats bilingues. Firmus a pu être également acclamé en d’autres circonstances (avant ou après la remise du torques) par des populations maures tribales voire des populations d’origine maure vivant dans le cadre des cités, et, dans ces cas-là, ce serait surtout le libyque qui aurait été utilisé, très peu voire pas du tout le latin : c’est là MNKD qui aurait été employé, que le sens de ce titre soit « chef militaire » ou « roi ».
2) Auraient pu être présents aussi bien des soldats de l’armée impériale que des Maures des tribus voire des populations civiles des cités, et dans ce cas, le latin et le libyque auraient pu être employés en cette même circonstance de façon comparable. La position de Firmus aurait donc été dénommée, en même temps et dans les deux langues, par les deux termes imperator et MNKD.
Dans l’un et l’autre cas, on formulera l’hypothèse d’un rôle important des soldats bilingues de l’armée impériale passés à Firmus dans la double formulation de la définition de sa position, en latin et en libyque. Mais il paraît impossible de déterminer si l’on a commencé par une dénomination latine suivie par une dénomination libyque, ou l’inverse, ou encore s’il y a eu d’emblée une double dénomination.
Venons-en au second point, les sens possibles d’imperator.
1) Une première hypothèse serait minimaliste : Firmus défini comme « chef maure » MNKD/imperator mais non comme usurpateur. Cela obligerait à dénier une signification de prétention au pouvoir « impérial » dans la prise du terme imperator. Une telle hypothèse fonctionne mieux dans le cas d’une remise du torques avec présence simultanée de Maures et de soldats romains bilingues, mais peut aussi concorder avec la présence des seuls soldats romains si l’on fait l’hypothèse de leur bilinguisme. En ce cas, ce serait le titre de MNKD qui aurait été pris en premier, à moins que les deux titres MNKD et imperator n’aient été pris simultanément. Du côté des tribus, des Mauricae nationes 122 ont dû soutenir Firmus, dans l’influence de son père Nubel uelut regulus et au-delà des seuls Iubaleni 123 . Cette situation le mettait dans une position élevée, qui pouvait se traduire par la prise du titre MNKD, au moins comme chef militaire suprême ; en latin, cette position se comprend comme celle d’un rex, surtout de la part du fils d’un princeps considéré comme uelut regulus. Mais comme MNKD pouvait se traduire par imperator, les Maures romanisés et les soldats romains, notamment d’origine maure, le soutenant l’auraient naturellement dénommé ainsi, sans pour autant voir en lui un véritable prétendant au pouvoir impérial (= un usurpateur pour ses ennemis) : on serait là devant une « traduction mécanique », faisant de Firmus, en latin, un imperator. La remise du torques et la port du sagus puniceus pourraient s’interpréter plutôt comme des symboles maures. Il n’empêche que des sources impériales, ayant enregistré cette dénomination et ces marques, auraient vu en Firmus un usurpateur.
On pourrait rapprocher cette proposition de l’hypothèse de J. Desanges sur les titres de dux et imperator portés au siècle suivant par Masties dans une inscription 124 : celui-ci, soixante-sept ans dux, c’est-à-dire chef de tribu, et imperator dix ans (les dix dernières années), aurait porté le titre d’imperator parce qu’il aurait été pendant cette période un chef puissant d’une confédération de tribus, donc un MNKD, qui se traduit mécaniquement en latin par imperator, sans que cela ne signifie en rien une usurpation. On peut toutefois signaler qu’Y. Modéran a contesté cette hypothèse et a proposé de voir dans ce titre d’imperator de Masties non pas la traduction de MNKD mais le signe d’un passage, vers 484, de la population romaine de l’Aurès, région désormais indépendante, sous la domination du dux maure ; par rapport à la population romaine, le titre d’imperator aurait été jugé préférable à ceux de dux et rex, « trop berbères » 125 . Il ne serait donc pas une traduction mais le signe de l’autorité exercée par un chef de tribu sur la partie romaine de ses sujets.
2) Une seconde hypothèse ne s’en tiendrait pas à la notion de traduction mécanique de MNKD par imperator mais accorderait à ce titre sa pleine valeur, ce qui ferait de Firmus bel et bien un usurpateur. Il faudrait donc que les soldats romains ayant assisté à la remise du torques aient été pleinement conscients de la portée de leur acte, quelle que soit leur origine et quelles que soient les langues pratiquées. Cette hypothèse fonctionne quelle qu’ait été la composition de l’assistance à ce moment-là et elle paraît mieux fondée que la précédente, dans la mesure où elle prend mieux en compte la nécessaire connaissance du latin par des soldats qui ne pouvaient méconnaître le sens d’imperator. Mais sans doute faudrait-il bien prendre la mesure des évolutions de l’affaire. Dès la première phase de la rébellion, dans laquelle sont impliquées, aux côtés de tribus maures (pour lesquelles Firmus aurait pu, dès l’origine, être perçu comme MNKD), des troupes romaines, aurait eu lieu une cérémonie de proclamation. Firmus aurait pu y être acclamé imperator ou même simultanément imperator et MNKD, que les participants aient été uniquement des soldats de l’armée impériale (mais sans doute largement d’origine maure) ou que l’assistance ait aussi été composée de Maures des tribus. On pourrait même ne pas exclure que le titre d’imperator ait été pris antérieurement à celui de MNKD, ou, tout au moins, en toute autonomie et non par simple traduction. Ces deux termes auraient été soit immédiatement soit rapidement utilisés par l’ensemble des partisans de Firmus. Les soldats romains (et Firmus lui-même) auraient difficilement pu ignorer que l’emploi d’imperator était une marque d’usurpation. Firmus aurait pu recevoir tout ou partie de la titulature impériale, assurément imperator, mais pas nécessairement caesar et augustus, qui, de toute façon, n’auraient pas eu à être traduits en libyque. Ainsi s’interpréteraient les sources qui mettent l’accent sur l’usurpation ou la suggèrent. Il est d’ailleurs intéressant que le texte de la Passio Sanctae Salsae, qui soutient le thèse de l’usurpation, évoque un épisode, la tentative de prise de Tipasa, qui doit se situer au début du soulèvement, donc dans le cadre du contexte qui vient d’être décrit : c’est ce qui a dû être conservé dans la mémoire locale 126.
D’un autre côté, pour les Maures des tribus, il aurait été naturel, dans de telles circonstances, de traduire ou retraduire imperator en libyque par MNKD (terme aussi compris par les punicophones). Or, à mesure que la révolte s’étendait parmi des Maures moins romanisés, celle-ci s’exprimait sans doute de moins en moins en latin et de plus en plus en libyque ; c’est surtout MNKD qui aurait fini par dénommer la position de Firmus, entendue par la grande majorité de ses soutiens comme celle d’un roi, et c’est comme un rex que le perçurent certaines sources impériales.
Cette seconde hypothèse permettrait de rendre compte des divergences apparentes des sources et des ambiguïtés d’Ammien. Les contemporains et les sources impériales auraient pu recevoir telle ou telle version, imperator d’un côté, rex de l’autre, termes qui traduisaient un même titre libyque, MNKD. On peut même se demander si l’Histoire Auguste n’aurait pas fourni la réponse à la question dans le chapitre apparemment délirant mais peut-être perspicace consacré à Firmus, en le dépeignant comme un être hybride, au visage sombre (ultu nigriore) et au reste du corps blanc (candidus) 127. Ainsi le portrait physique de ce Firmus inventé serait la représentation métaphorique de la dualité de nature du Firmus historique, à la fois chef maure et prétendu imperator et non pas l’un ou l’autre.
Aussi pourrait-on proposer de renoncer à l’alternative traditionnelle « usurpateur » ou « roi des Maures ». À un seul terme libyque, MNKD, le latin offrait deux traductions possibles, imperator et rex, et Firmus a pu être l’un et l’autre. À une vision statique, qui oppose frontalement des sources aux contenus contradictoires et contraint à choisir entre des hypothèses diamétralement opposées, on pourrait préférer une vision dynamique qui rende compte à la fois de la complexité du réel, de la diversité linguistique, des étapes d’une évolution et des divergences des sources. En la figure de Firmus, victime d’une ambiguïté subie et acteur cherchant désespérément à sauver sa position et sa vie, se seraient cristallisées des mémoires impériales et des mémoires autochtones ainsi que des aspirations d’une société 126 La présence de Théodose à Tipasa est mentionnée assez rapidement (XXIX, 5, 17), peu avant son arrivée à Césarée qui a été dévastée (XXIX, 5, 18) ; les attaques contre Césarée et Tipasa ont eu lieu au début de l’affaire. 127 SHA, Quadr. tyr., IV, 1.
Alain CHAUVOT (UMR 7044 UDS/UHA/CNRS)
1 Pour les événements, CAMPS 1997, p. 2845-2855 (malgré une présentation discutable, p. 2849, de la scène du « couronnement » de Firmus).
ANDRÉ, J., 1949, Étude sur les termes de couleur dans la langue latine, Paris.
2 KOTULA 1970, p. 138-142.
3 MATTHEWS 1989, p. 375.
4 DEMANDT 1968, p. 283 ; DEMANDT 2007, p. 142.
5 DRIJVERS 2007, qui renvoie à l’essentiel de la bibliographie antérieure (bien qu’il ignore LENGRAND 1995), et qui propose de voir dans la « rébellion » le passage progressif d’une révolte sans objectif politique déterminé à une entreprise de séparation de la Maurétanie d’avec l’Empire, sans qu’il y ait jamais eu de volonté d’usurpation.
6 On pourrait employer le terme de Mauri, à condition d’avoir présente l’esprit sa polysémie ; il peut désigner aussi bien des population ayant par bien des traits les caractères du barbare que des habitants de la province d’Africa ; cf. en particulier FÉVRIER P.-A. 1983, p. 302-303 = FÉVRIER P.-A 1996, p. 858-859 ; MODÉRAN 2008, p. 92-93, observe que le terme désigne les communautés tribales des provinces occidentales de l’Afrique, appelées Maurétanies, mais aussi des acteurs essentiels de l’évolution des provinces orientales de l’Afrique romaine, de la Numidie à la Tripolitaine, cette population-ci étant au IVe siècle intégrée à des cités ou à de grands domaines. Le terme est peu employé par Ammien (pour Firmus (XXIX, 5, 3 ; 15), qui préfère donner des noms de tribus, cf. FÉVRIER P.-A. 1985, p. 302 = 1996, p. 858.
7 Ammien, XXIX, 5, 28.
8 LEPELLEY 2005, p. 142. Sur l’emploi du libyque et du punique, cf. BÉNABOU 1976 = 2005, p. 475-489.
9 JONGELING et KERR 2005, p. 2-5.
10 Il faudrait ajouter, pour les sources, le grec, en raison de Zosime, IV, 16, 3.
11 LENGRAND 1995, p. 151.
12 FÉVRIER 1951, p. 142-150 ; CAMPS 1960, p. 216-217 (qui se demandait toutefois aussi s’il ne fallait pas traduire l’expression par « maître des cités »).
13 Nubel serait à identifier avec Flavius Nuvel, de CIL 9255, qui mentionne son arrière-grand-père qui n’était pas citoyen romain
14 Ammien, XXIX, 5, 20.
15 XXIX, 5, 48.
16 FRÉZOULS 1957, p. 113-114 ; LEVEAU 1973 ; LEPELLEY 1974 = 2001 ; BÉNABOU 1976 = 2005, p. 446-469 ; CAMPS 1984 ; MODÉRAN 2003, p. 481-493.
17 LEPELLEY 2001, p. 315.
18 AE 1907, 150 (Teniet Meksen).
19 CIL VIII 2615 = ILS 1194.
20 Augustin, Lettre 199, CSEL, 57, 12, 46, p. 284.
21 Inscriptions latines d’Afrique (ILA), 609 (ara pacis de Volubilis).
22 FRÉZOULS 1957, p. 113.
23 CTh XII, 12, 5.
24 MODÉRAN 2004, p. 387.
25 Ammien, XIV, 10, 1 (Gundomad et Vadomer fratres Alamannorum reges) ; XVI, 3, 2 (reges Francorum) ; XVI, 12, 1 (les reges des Alamans à la bataille de Strasbourg) etc… 26 XVI, 12,
26. 27 XVIII, 2, 13.
28 XVII, 12, 9-11.
29 XVII, 13, 24.
30 FANNING 2010, p. 50.
31 Salluste, Guerre de Jugurtha, XI, 2 ; XII, 1 ; XII, 2.
32 Tite Live, XXXVII, 25, 8-9 : « L’Africain rappelait à Prusias l’usage constant du peuple romain d’honorer la majesté des rois ses alliés ; il citait les exemples qui lui étaient personnels pour engager Prusias à se rendre digne de son amitié : « des roîtelets espagnols s’étaient confiés à sa bonne foi, en quittant l’Espagne il les avaient laissés rois » (regulos se acceptos in fidem in Hispaniam reges reliquisse).
33 On ne saurait par exemple interpréter ainsi Tacite, Agricola, XXIV, 4 : « Agricola accueille un des reguli d’Hibernie… ».
34 Ammien, XXIX, 5, 11.
35 XXIX, 5, 21
36 Ibid.
37 XXIX, 5, 27.
38 XXIX, 5, 51.
39 XXIX, 5, 35.
40 XXIX, 5, 46 ; 51.
41 MATTHEWS 1989, p. 368.
42 Ammien, XXIX, 5, 41.
43 XXIX, 5, 40.
44 XXIX, 5, 46.
45 XXIX, 5, 47.
46 XXIX, 5, 46.
47 XXIX, 5, 2.
48 XXIX, 5, 44.
49 CIL VIII 9255.
50 CAMPS 1984, p. 185-186 ; LENGRAND 1995, p. 146-148.
51 En dernier lieu : LAPORTE 2004, p. 281-283.
52 FANNING 2010, p. 50.
53 CAMPS 1984, p. 187.
54 LENGRAND 1995, p. 234-235
55 Ammien, XXIX, 5, 2.
56 XXIX, 5, 28.
57 XXIX, 5, 2.
58 XXIX, 5, 13.
59 XXIX, 5, 6 ; 21 ; 24.
60 XXIX, 5, 11 ; 14.
61 XXIX, 5, 11.
62 XXIX, 5, 40 ; 41.
63 MATTHEWS 1989, p. 369.
64 MATTHEWS 1989, p. 373, p. 381.
65 MATTHEWS 1989, p. 372.
66 ILS 9351.
67 XXIX, 5, 11.
68 XXIX, 5, 28.
69 DEAN 1916, p. 28-29 ; p. !15 ; p. 186-187.
70 CAMPS 1985, p. 249. 71 SEG IX 455.
72 Ep. 2, 401, 10.
73 Ammien, XXIX, 5, 3 ; traduction de G. Sabbah. C’est l’idée d’une « séparation » qu’exprime le verbe desciscere.
74 XXIX, 5, 8.
75 XXIX, 5, 15 ; 17.
76 XXIX, 5, 4.
77 XXIX, 5, 6.
78 XXIX, 5, 46.
79 XXIX, 5, 20.
80 SHA, Max. Balb., II, 5 ; 10 ; XVII, 1 ; 2 ; 6.
81 DRIJVERS 2007, p. 141 ; Ammien, XXI, 13, 16 (Julien) ; XXVI, 9, 10 (Procope).
82 XXIX, 5, 36 ; 52 ; 55.
83 DRIJVERS 2007, p. 141, cf. Ammien, XV, 5, 19 (Silvanus) ; XX, 8, 21 ; XXII, 14, 4 (Julien) ; XXVI, 5, 11 ; 7, 13 ; 8, 1 (Procope).
84 Recensement et commentaires : KOTULA 1970, p. 139-140 ; DRIJVERS 2007, p. 139-142.
85 Orose, VII, 33, 5 : Interea in Africae partibus Firmus sese excitatis Maurorum gentibus regem constituens Africam Mauretaniamque uastauit.
86 Augustin, Contra epistulam Parmeniani, I, 10, 16 : regem barbarum Firmum ; 11, 17 : Firmum barbarum.
87 Passio Sanctae Salsae, 13 : uellet (…) sibi imperii dominatum contra ius fasque degener uindicare gentilis.
88 Zosime, IV, 16, 3.
89 SHA, Quadr. tyr., II, 1-2 ; dans Aurel., XXXII, 2, Firmus est présenté comme s’étant emparé de l’Égypte sans avoir reçu les insignes du pouvoir (sine insignibus imperii). Sur ces passages, FÉVRIER P.-A. 1986, p. 124-125. = FÉVRIER P.-A. 1996, p. 918-919.
90 Ammien, XXIX, 5, 20.
91 XXIX, 5, 48.
92 XX, 4, 17-18 ; KOTULA 1970, p. 141-142.
93 XXI, 5, 20.
94 XXIX, 5, 24.
95 XXIX, 5, 20 ; XXIX, 5, 31 ; XXIX, 5, 39.
96 CAMPS 1997, p. 2849.
97 BRIAND-PONSART et HUGONIOT 2005, p. 306-307.
98 LENGRAND 1995, p. 154.
99 Ammien, XXIX, 5, 31 ; cf. DRIJVERS 2007, p. 141, qui comprend « un petit nombre de déserteurs ».
100 XXIX, 5, 49.
101 XXIX, 5, 24.
102 LENGRAND 1995, p. 158-159.
103 ANDRÉ 1949, p. 88-90, p. 93-102
104 Tite Live, XXX, 27, 1.
105 César, Guerre d’Afrique, 57, 5.
106 En revanche, on ne saurait s’appuyer, comme le fait D. Lengrand, loc. cit., sur Procope de Césarée, Guerre des Vandales, XXV, 5, 8, car celui-ci mentionne un manteau blanc comme insigne de commandement des Maures, reçu de la part de l’Empire.
107 FÉVRIER 1951 ; CAMPS 1960, p. 216-217 ; CAMPS 1985, p. 249-250 ; CHAKER 1985, p. 248-249 ; CHAKER 1987, p. 585-589 ; CHAKER 1995, p. 171-198.
108 CHAKER 1987, p. 585.
109 CAMPS 1960, p. 217.
110 BERGER 1888, p. 39-40.
111 JONGELING et KERR 2005, p. 45.
112 CAMPS 1985.
113 CHAKER 1995, p. 173-174.
114 CHAKER 1995, p. 183 ; p. 194.
115 CHAKER 1987, p. 585 ; CHAKER 1995, p. 182.
116 IPT 1987, 21 (8 av. J.-C. ; dernière éd. et trad. : QUINN, J.C., 2008, p. 65 : mynkd qysr wgsts.
117 CHAKER 1995, p. 182.
118 Cette éminente dénomination n’a peut-être pas été sans effet sur le sort de Firmus. Car le MNKD qu’il était devenu s’est trouvé par contrainte allié d’un roi qui était peut-être un autre MNKD puissant en la personne d’Igmacen, qui a fini par le trahir. Ammien explique la trahison d’Igmacen par les défaites subies et la peur de perdre la vie en persistant dans son alliance avec Firmus (XXI, 5, 51). On peut se demander aussi si n’a pas joué la difficulté voire l’impossibilité qu’il y ait, en présence l’un de l’autre, deux MNKD : c’était un de trop, et au cas ou Firmus demeurait hors d’atteinte de Théodose, il aurait pu porter atteinte à son propre pouvoir ; la « trahison » d’Igmacen apparaît de toute façon comme un opération de préservation de sa propre position.
119 CHASTAGNOL 1988, p. 12-14.
120 Ammien XXVI, 7,1 ; XXVII, 6, 5 (proclamation de Gratien) ; cf. MAUSE 1994, p. 184, sur son emploi dans les panégyriques.
121 Ammien, XXVI, 4, 1.
122 Ammien, XXIX, 5, 2.
123 XXIX, 5, 44.
124 CARCOPINO 1944.
125 DESANGES 1996 ; MODÉRAN 2003, p. 402-406.
126 La présence de Théodose à Tipasa est mentionnée assez rapidement (XXIX, 5, 17), peu avant son arrivée à Césarée qui a été dévastée (XXIX, 5, 18) ; les attaques contre Césarée et Tipasa ont eu lieu au début de l’affaire.
127 SHA, Quadr. tyr., IV, 1.
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