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Ammar Negadi, ce symbole amazigh de l’Aurès authentique

Il y a 7 ans, le 2 décembre 2008 s’est éteint à l’hôpital Cochin à Paris, Ammar Négadi , ignoré par les officiels et par une grande partie de la presse nationale la même qui l’a ostracisé de ses colonnes de son vivant, se montra fort parcimonieuse en hommages nécrologiques.

Et pourtant, le jour de son inhumation à Tamarwent (Marouana, Batna) fut mémorable , tous les militants culturels dans l’Aurès se sont donné rendez-vous dans son village et lui ont rendu un hommage grandiose qui sied à un homme de son envergure .

Le pionnier du militantisme berbère dans les Aurès

La prise de conscience identitaire était très précoce chez Ammar Négadi, dès le débuts des années 1960 alors que l’Algérie et surtout l’Aurès se relevaient à peine d’une guerre atroce dont les stigmates sont encore visibles dans les chairs et dans les têtes, le jeune Ammar, conscient du danger qui guettait la culture amazighe dans les Aurès, avec l’installation d’un régime totalitaire d’obédience baâtiste liberticide à Alger, seul, il a tenté de constituer un petit noyau de jeunes amoureux de leur culture qui s’est donné pour mission de vulgariser les rudiments du combat amazigh et entamer le travail de recherche et d’assemblage du patrimoine chaoui afin de le soustraire à l’oralité et donc à une disparition inéluctable. Son activité fut jugé subversive par l’appareil répressif du parti unique qui contrôlait presque tout dans les Aurès à cette époque. Il fut contraint à s’exiler en France.

Les années Agraw Imazighen

Ammar Negadi adhère en 1974 à l’académie berbère (Agraw Imazighen) dirigée à l’époque par le grand militant berbère Mohand Arab Bessaoud, il se distinguera très vite par son énergie débordante et la pertinence de ces contributions qu’il signera ‘’Ammar des Aurès’’ et ensuite ‘’Ammar chaoui’’, faisant l’unanimité parmi ses camarades de l’académie, il fut intronisé président du comité Paris-région Ile-de-France de l’Agraw Imazighen.

Au sein de l’Académie berbère dans laquelle il était le seul chaoui, Ammar Négadi entreprendra un grand travail pour l’aménagement et la vulgarisation de l’usage de l’alphabet tifinagh dont il était un défenseur acharné, il ne manquera pas d’entrer en conflit avec Mouloud Mammeri partisan de l’alphabet latin et qui était à cette époque directeur de la chaire berbère à l’université de Ben Aknoun .

Pendent, ce temps-là il ne coupera pas le contact avec son Aurès natal et il établira une correspondance assidue avec les activistes culturels chaouis, à travers lesquels il propagera les publications de l’académie berbères ainsi que l’usage de l’alphabet tifinagh.

La brouille avec Bessaoud Mohand Arab et l’éclatement de l’académie berbère

En 1975 à cause d’un climat délétère de suspicion qui régnait au sein de l’académie, ainsi qu’un déficit de démocratie dans la gestion, Ammar Négadi fut contraint de claquer la porte tout en restant cependant en étroite relation avec ses anciens camarades. La crise qui couvait au sein de l’académie berbère a fini par éclater au grand jour, en 1978 l’académie fut accusée de financement illicite et Bessaoud Mohand Arab fut emprisonné pour délit de racket, il restera en prison 6 mois. Une fois libéré après son appel, il réussira à gagner l’Angleterre via l’Espagne, où il demande et obtient l’asile politique. On apprendra plus tard qu’Agraw Imazighen et son président ont été victimes d’une machination ourdie par les amicalitistes du FLN qui ont noyauté en profondeur l’académie.

En l’an 2000 lorsque Bessaoud Mohand Arab dans un livre intitulé “Des Petites Gens pour une grande cause : L’histoire de l’Académie berbère (1966-1978)” apportera des graves accusations à l’encontre de Ammar Negadi et les anciens camarades de l’académie berbère, ce dernier avec sa sobriété et son calme habituel a refusé d’entrer dans cette polémique et se contenta d’une brève mise au point sur son site.

Un grand militant auquel la culture amazighe doit beaucoup

Après avoir quitté l’académie berbère, Ammar Négadi a ouvert la premier librairie amazighe à Paris “Adlis Amazigh” rue Léon Frot, dans le 11e Arrondissement. Peu après 1978, il fonda l’Union du peuple amazigh (UPA) et lança le bulletin Azaghen/lien, sis rue Neuve des Boulets, c’est le bulletin qui émettra pour la première fois le premier et non moins célèbre calendrier amazigh qu’on doit à Ammar Négadi. Il dira à ce propos : “La première fois que fut publié et diffusé un calendrier amazigh, ce fut en 2930, c’est-à-dire en 1980, par l’association Tediut n’Aghrif Amazigh (Union du Peuple Amazigh -UPA-), que j’ai l’honneur d’avoir fondée, dirigée, et donc je suis l’initiateur de ce fameux calendrier. Le calendrier, très simple et très modeste, à la mesure de nos moyens à ce moment-là, se présentait de la façon suivante : il était à la fois manuscrit et dactylographié, au format 30×42 cm, en son centre, sur les ¾ du haut il représentait un Tergui prêt à dégainer son glaive dont le fourreau était orné par un mot en tifinagh …”, les bulletins du UPA continueront de promouvoir l’alphabet tifinagh, l’association Afus Deg Wfus s’est inspiré des travaux de Ammar Négadi et a réalisé en 1993 le premier standard des polices de caractères en tifinagh. L’UPA éditera également les premières listes des prénoms amazighs.

Le dernier rêve de Ammar Negadi qu’il n’a pas pu réaliser, était de créer une bibliothèque dans les Aurès qui réunira les ouvrages qu’il a rassemblés au cours de sa vie afin de permettre aux jeunes Chaouis d’apprendre l’Histoire de leur peuple, ce qui leur permettra de lutter contre la négation et l’aliénation de leur identité culturelle et hâter ainsi l’émergence d’une Algérie qu’il a toujours appelé de ces vœux, une Algérie où le peuple algérien se réconcilie avec lui-même, c’est-à-dire avec ses origines, son identité, et sa culture.

Jugurtha Hanachi

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